Lasolution Ă ce puzzle est constituéÚ de 7 lettres et commence par la lettre S. CodyCross Solution pour PRĂNOM DE FREUD, LE PĂRE DE LA PSYCHANALYSE de mots flĂ©chĂ©s et mots croisĂ©s. DĂ©couvrez les bonnes rĂ©ponses, synonymes
SigmundFreud le pĂšre de la psychanalyse. Sigmund Freud le pĂšre de la psychanalyse, dâaprĂšs lâexposition du musĂ©e dâart et dâhistoire du judaĂŻsme. Sa formation Ă Vienne, sa venue Ă Paris, et sa carriĂšre en Autriche sont au cĆur de notre rĂ©flexion. Câest avec lui que la neurologie fera des progrĂšs extraordinaires.
1solution pour : EN RAPPORT AVEC LE PERE DE LA PSYCHANALYSE - mots fléchés et mots croisés Sujets similaires PÚre de la psychanalyse (100%) Désir de psychanalyste (60.09%) PÚre (42.08%) Pour un pÚre (42.08%) Du pÚre (42.08%) Rapport (39.46%) Qui rapporte (39.46%) Rapporte (39.46%) Rapportée (39.46%) Purée de purée (34.59%)
Cest en ça que la psychanalyse â de rĂ©ussir ! â prouve que le Nom-du-PĂšre on peut aussi bien sâen passer Ă condition de sâen servir. (Sem. 23, Leçon 10 : 13 avril 1976. Page 9). Alors maintenant le RĂ©el, le Symbolique et lâImaginaire plus le Nom du PĂšre, nous pouvons le comprendre comme un RĂ©el, Symbolique et Imaginaire
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Face Ă la disjonction cette conjonction indiquĂ©e dans ce schĂ©ma, est-elle abusive dans une Ă©quivalence souvent trop Ă©vidente entre pĂšre et parole, retournement incessant, immĂ©diat, implicite entre Nom du PĂšre et PĂšre du Nom ?Face Ă quoi l'analyste est invitĂ© Ă se situer et intervenir, ne cessant pas de garder ouvert son dossier de fait il est trop rapidement, surtout aujourd'hui, Ă©vocateur de la structure, dâun âpur-cristal-structureâ, faisant rĂ©union d'une façon trop simpliste entre pĂšre et parole, Ă les confondre dans un avant coup, en un chaos originaire, le tohu-bohu de la Bible, en place de produire lâĂ©nigme du lien entre amour et haine sâappuyant su rle fameux narcissisme primaire, au point de remplir de mystĂšres la pratique de la psychanalyse autour dâun tel pur cristal structure plan clinique ce schĂ©ma ici est utile car il montre quâil sâagit du pĂšre symbolique voisinant en dessous de la feuille de papier avec un rĂ©el qui est trou vrai , vrai trou dans la structure habillĂ©e par du-pĂšre Ćdipien. Soit que du morceau de pĂšre fasse trou, donc en lien avec les trois ronds borromĂ©ens. Câest ce trou qui exige les trois ronds de ficelle et non lâinverse les conditions R S I de lâinconscient freudien sont telles que c est via ce trou que la psychanalyse surgit dans le monde .RĂ©el tel que lâen-dessous de la feuille de papier câest le fĂ©minin qui ne fait pas rapport avec le point pĂšre, car entre les deux faces de la feuille, existe son tranchant en plan frontal, existe un impossible Ă reprĂ©senter car le tranchant de la feuille de papier est de ce rĂ©el .2 Alors la pratique psychanalytiqueâŠ.Pratique qui n'en demande pas tant puisque prĂ©cisĂ©ment de par la dynamique qui lui est singuliĂšre, elle interroge l'advenue Ă l'existence et les modalitĂ©s d'application de ce pur-cristal-structure et dont seuls ses avatars sont en perceptibles dans une cure. .Soit du coup de poser la question de l'imaginaire, la question du corps comme rapport possible au pĂšre question, par exemple, inscrite dans les manuels de psychanalyse Ă la rubrique â Figures du pĂšre â.Un document, pris dans l'art cinĂ©matographique, va nous Ă©clairer et poser un tel abord du-pĂšre, c'est le Popeye d'Altman. LĂ sont montrĂ©s les effets, comiques certes, de stupiditĂ©, de stupĂ©faction, de stupeur que provoque le signifiant sur le sujet, si l'imaginaire ne vient pas tamponner, contenir les effets du rĂ©el en prise directe sur le symbolique. Le signifiant pĂšre, comme Nom-du-PĂšre, indique que la place de ce lieu de ce nom est toujours vide. Vide comme l'Autre, comme le ciel lâest de Popeye the sailor, dans sa stupeur, face Ă la rĂ©alitĂ© du Un sĂ©parateur articulant les signifiants ME entre eux , lance-t-il â oukâtĂ©papopa ? - oĂč n'es-tu pas popa ?.Il trouvera alors son pĂšre Ă sa place dans le lieu, soit un type ficelĂ© attachĂ© au plafond d'une cale de bateau, comme tout le monde. A le penser nulle part, il le trouve enfin partout c'est-Ă -dire dans le symbolique, rĂ©duit Ă faire rite, idolation du symbole de l'absence, ici marquĂ© du fait de chercher pour ne pas le symbolique pour ne pas trouver le rĂ©el et entre il y a lâimaginaireâŠPĂšre dĂ©ficelĂ© et fils se retrouvent, mĂ©diation l'un de l'autre, et s'apprĂ©hendent miroirs en place de salauds moyens, de flibustiers genre lien social entre analystes, soit avec tout ce qu'il faut pour ne pas ĂȘtre trop dupes, moins stupĂ©faits par le rĂ©el inhĂ©rent Ă la lĂ surgit le trauma, par le dĂ©sir du pĂšre, le flagrant dĂ©lit de pĂšre montĂ© en scĂšne par lâhystĂ©rique qui par ses symptĂŽmes crĂ©e son discours dont comme sujet elle ou il est lâagent .A cette stupĂ©faction du trauma fait Ă©cho la pudeur, et rĂ©vĂšle lâaspect pudique propre Ă la structure du signifiant, soit de se poser manquant. Pudeur entre signifiant et corps. Cette pudeur est en fait du registre de la structure, la marque de lâimpossible d'un rapport sexuel. Genre pĂšre et fĂ©minin de part et dâautre de la feuille de papier du schĂ©ma que citer un film et un film sur la filiation pose la question de l'auteur d'une crĂ©ation qui ne peut faire dĂ©sirer sinon Ă son insu, car aucune mesure, aucun calcul ne sauraient imiter l'impossible dans une Ă©quivalence sans confusion entre le Un sĂ©parateur, disjonctif, et la conjonction, propre au discours de lâhystĂ©rique qui en advient et qui jouit de sa place de passeur de la jouissance du si la fonction du-pĂšre est d'emblĂ©e Ă©quivalente au pur symbolique de la structure pudique du signifiant, sorte de sans faute du pĂšre une fois fait dieu, se posent les questions de l' que le rĂ©el du pĂšre symbolique tenant ensemble, ni dispersĂ©s ni confondus, phallus, mĂšre, enfant, fait que la marque, le manque phallique est garanti, savoir que la psychanalyse ne nous abandonnera pas, mais avec le risque de rester dans le rite du signifiant pur, l'idolation de ce manque de prise en compte de lâ cela se modĂšre par la fonction de l'imaginaire de la figure du pĂšre comme processus dynamique, comme index du rĂ©el qui tient seul du fait de la pratique de la psychanalyse, et invite Ă une sortie du pur tout christ-christ all- de la religion oĂč tout est alors pointer maintenant cette nĂ©cessitĂ© de l'articulation entre imaginaire et structure ?Un exemple nous Ă©claire. Le document est le suivant . â pourquoi sommes-nous sur la Terre ? - est une question mise en travail par un thĂ©ologien au colloque â Confrontations â de 1982. - Si nous sommes sur la Terre, alors c'est que papa et maman ont eu des rapports sexuels, ont fait l'amour ensemble â, etc., Ă©tait alors joliment avancĂ© comme y a lĂ un appel au bon sens, Ă l'imaginaire, et qui se montre toujours Ă se dresser vers le haut, vers le religieux. Or cela plafonne vite, sous la forme par exemple d'un cadeau vraiment obtenu du ciel. Or le ciel est cela, la clinique le montre, enclenche la part phobique de lâhumain, prĂ©sente dans toute nĂ©vrose, puisque la phobie c est le risque que le ciel ne soit plus vide. Les croyants prient que le trou reste trou et la meilleure façon c est de nâen rien Ă faire jouer dans cette phrase l'implication logique et la nĂ©gation, nous aboutirions rapidement Ă la transparence de la formule, du genre si nous ne sommes pas sur la terre, c'est qu'alors papa et maman nâont pas fait lâamour et lĂ surgit le vertige de comment le savoir puisque je ne suis pas sur la Terre. VoilĂ la question de lâ documents indiquent la question du pĂšre. Ainsi le CongrĂšs de MontrĂ©al des langues romanes Revue française de psychanalyse, n' 5, 1982 avance que la question du pĂšre, dans son actualitĂ©, est fondamentalement liĂ©e Ă l'Ă©thique de la psychanalyse soit que les Ă©lĂ©ments en cours dans une cure sont le fait quâils ont trait aux propres dĂ©faillances inhĂ©rentes Ă la structure qui les la question des ProcrĂ©ations MĂ©dicales AssistĂ©es le rapport au pĂšre gĂ©niteur et au Nom du PĂšre, qui renvoie au thĂšme â de l'Ă©tranger â, Ă savoir de poser la diffĂ©rence entre nouveau venu et encore les assertions sur l'aplatissement de l'imaginaire du pĂšre dans le discours politique ne sommes-nous pas face au triomphe de l'image tĂ©lĂ©visĂ©e qui gadgĂ©tise tout, oĂč le pĂšre nâest investi que comme objet rĂ©el, dans notre rĂ©alitĂ©, alors qu'il s'agit simplement de l'idolation de la technique, soit du gadget... et donc du pĂšre mis en tension avec ce pur cristal structure que nous sommes amenĂ©s Ă poser pour dĂ©-chosifier le du-pĂšre pris dans lâidĂ©al comment en effet poser la question du pĂšre cotĂ© psychanalyse aujourd'hui ?Cela permet-il de prĂ©ciser les conditions symboliques, de discours, de l'expĂ©rience psychanalytique ?Le dossier du-pĂšre vĂ©rifie-t-il que les conditions de la pratique sont les registres RĂ©el, Imaginaire, Symbolique, et cotĂ© Freud sont-elles lâĆdipe, le transfert, la castration ? qui sont nos appuis lâEnseignement de Jacques Lacan et lâOeuvre de Freud?Mais si le du-pĂšre vient poser aux analystes la question de ce qu'ils font dans la pratique, cette question peut ĂȘtre retournĂ©e. En effet, la pratique vĂ©rifie-t-elle â du-pĂšre â ? Le â du-pĂšre - cadrĂ©, Ă©clairĂ© par la psychanalyse mieux ou plus qu'ailleurs ? Les conditions de l'expĂ©rience psychanalytique sont elles causes ou consĂ©quences de la question du-pĂšre ?Un exemple nous fait s'agit d'un rire d'enfants assistant au film de Spielberg, l'extra-terrestre, survenu quand la plupart des enfants de la salle de spectacle constatent qu'Eliott le hĂ©ros du film, c'est dĂ©jĂ littĂ©ralement s'identifie et sauve un certain extra-terrestre en trĂšs grand rire, qui prĂ©domine donc chez les enfants bien plus que chez les adultes prĂ©sents dans la salle de spectacle, survient quand cette prĂ©sence est rĂ©vĂ©lĂ©e comme semblable en place de semblant. en place de semblant autorise, de ce signe fait avec un doigt bizarrement pĂ©nien traversant tout lâĂ©cran , la relation de prochain Ă prochain fondĂ©e sur l'Ă©galitĂ© face Ă la parole comme porteuse de et sont en Ă©galitĂ© face au semblant qui les tient vivants dĂ©sirants .Place est faite Ă la parole dans l'Ă©change de ceux qui se reconnaissent semblables et qui sont pourtant trĂšs dissemblables quant Ă l'image rĂ©elle. Le rire signe ce pacte avec cette face monstre de l'animal-pĂšre accĂ©dant Ă la parole, au symbolique, Ă lâapprivoisement du pĂšre est comme le criquet pĂšlerin dĂ©crit par Lacan Ă propos du stade du miroir venu de sa maison, il doit y retourner. Eliott et sont pareils, de mĂȘme grĂ©garitĂ©. Comme Popeye pĂšre et fils. Du miroir les tient les lettres E et T sont les initiales de EliottâŠ.Mais ce câest aussi le radicalement Ă©tranger. Venu dâune autre planĂšte que la Terre oĂč nous sommes parce que papa et maman ont fait boum boumâŠSurgit alors l'envers de la question â d'oĂč viennent les enfants ? â, sous la forme deâ oĂč va un pĂšre ? â A la mort, dit Freud. Est ce lĂ ce qui lui a fait faire son analyse , et nous depuis et devenir fin du rĂ©cit se marque du dĂ©part oĂč est dit Ă Eliott â je suis toujours avec toi â, soit de lâaltĂ©ritĂ© et de lâĂ©tranger sont en toi. Nemen mensh le plus loin et le plus roche, le plus secourable et le plus source dâeffroi. Question pĂšre c est que le pĂšre se sait pĂšre mais depuis qui ? dâoĂč mon titre sous forme dâune redondance de auparavant dans le film, il est nĂ©cessairement mort. Il y a lĂ le du-pĂšre qui vient Ă s'enfouir dans la mort comme question, comme pur est bien marquĂ©, fĂ©eriquement, puisque Eliott. redonne vie Ă vie au sens du dĂ©sir, puisque le signe de la rĂ©surrection est qu'une fleur fanĂ©e que est mort, qu'il est en place de pĂšre, et qu'il le sait, pour une fois, contrairement Ă ce que Freud nous apprend dans son rĂȘve fameux qu'un â pĂšre Ă©tait mort et qu'il ne le savait pas... â quâil Ă©tait pĂšre et/ou quâil Ă©tait mortâŠ.Lâhomme aux Rats, lui, rĂ©sout cela par ses sentences et contraintes pour effacer les traces des traces de ses inhibitions, symptĂŽmes et angoisses, pour attendre, comme Hamlet, que le spectre du pĂšre archi-mort lui dise sa jouissance, dâoĂč pour notre obsessionnel hyper douĂ© de se masturber comme de cette issue⊠à sa pulsion sexuelleEt ET » lettres en français de la conjonction, c'est alors lĂ le dĂ©part vers son - home - et la dĂ©claration d'amour du fils au pĂšre, pĂšre enfoui dans l'inconscient du sujet, oubliĂ© sous la forme d'un dieu stellaire, cosmique. OubliĂ© =DĂ©clin du complexe dâĆdipe au sens de Freud.Ainsi, sorte d'animal Ă abattre au dĂ©part, trace d'altĂ©ritĂ© ensuite, vient Ă ĂȘtre imaginarisĂ© sous la forme de cette figure de pĂšre avec laquelle un pacte s'est conclu le rire d'enfants assistant au spectacle en tĂ©moigne. Figure Ă forme de grenouille, de cochon, c'est aussi un symbole trĂšs singulier, une automobile avec un Ă©norme feu clignotant Ă la place du cĆur, Ă allure le moi et l'inconscient, câest lĂ oĂč le fils se situe comme mĂ©diation de la parole, Eliott et Popeye payent ainsi leur dette en renvoyant cette parole au pĂšre, qui Ă©videmment s'en empare comme tout le effet, au plan dit imaginaire, le pĂšre, dans la rĂ©alitĂ© d'Eliott, a quittĂ© sa famille, il est absent, parti au Mexique avec Sally, sa belle. Cette absence rĂ©alisĂ©e du pĂšre, est exigĂ©e pour la marche du rĂ©cit, du scĂ©nario. Câest lĂ sa jouissance, e câest la cause du rĂ©cit qui en est fait et implique quâEliott s'invente en place de pĂšre de touche Ă lâexil certes rĂ©el de ET mais surtout Ă lâexil interne dâEliott, celui inhĂ©rent Ă la structure de bĂ©ance , au trou irrencontrable mais non sans effet. On est exilĂ© de sa structure, de ce pur cristal structure et dont ses avatarsâŠ.seuls sont perceptibles. Notamment par le corps de du-pĂšre Ă lâ allure de ce qui commence un fĆtusâŠ.CORPSSur le plan du rĂ©el, c'est par ce moyen-lĂ , rĂȘve, fantasme, que le rĂ©el du corps du pĂšre est interrogĂ©, et il est interrogĂ© par le sadisme des savants mĂ©decins qui prennent comme proie de leur dĂ©sir de savoir et rĂ©vĂšlent que cet Ă©tranger est en exclusion comme Autre radical, diffĂ©rent mĂȘme de l'Ă©trangetĂ© et qu'ils doivent le faire rentrer dans leur ordre symbolique. Ainsi un flic ne va-t-il pas dire que cela fait une Ă©ternitĂ©, dix ans, qu'il attend lui aussi Par la mĂȘme, ĂŽ combien, surgit le souhait de la rencontre avec l'Autre quand il s'agit de la question du pĂšre...5Avec ce document-lĂ , maintenant peut ĂȘtre abordĂ© le rapport entre pratique de la psychanalyse et le pĂšre comme cela on lâa vu câest le rapport du pĂšre a la mort, savoir l'enfouissement de la question du-pĂšre dans celle de la mort. Cette fonction du pĂšre 1ER absentiifeâ la mort dans lâinconscient .Câest le renversement de la question d'oĂč viennent les enfants â en oĂč va un PĂšre », Ă la mort ». Et qui pose la question suivante comment commencent la nĂ©vrose, l'inconscient, la parole ? oĂč le mot â comme disait Aragon, est le plus beau mot de la langue française, car il Ă©voque prĂ©cisĂ©ment l'existence mĂȘme de la antĂ©cĂ©dence premiĂšre, de pure logique, du comment ça commence, est propre Ă la fonction de substitution de la mĂ©taphore paternelle dans I'Ćdipe au sens exemple de ce qu'on appelle - fĂȘte des pĂšres - nous Ă©claire en effet un enfant Ă©crit Ă son pĂšre, Ă l'occasion de cette fĂȘte, que le seul cadeau qu'il puisse lui faire est de lui Ă©crire qu'il existe une fĂȘte des pĂšres, soit qu'il y ait de l'existence!Cette existence s'Ă©crit par exemple il Ă©tait une fois » qui se rĂ©pĂšte et oĂč se pose, d'une part, la premiĂšre symbolisation de la mĂšre articulant sa prĂ©sence et son corps et donc celui de l'enfant; et d'autre part, l'absence du pĂšre en ce pĂšre primordial, propre Ă sa mort articulĂ©e prĂ©cisĂ©ment Ă lâidĂ©alitĂ©, ce pour quoi il n'existe plus aucun au delĂ c'est le dieu des philosophes, qui se situerait toujours au ciel, et pour Freud il est ramenĂ© sur la Terre, et il s'appelle le pĂšre primordial. Fonction radicalement autre, d'ĂȘtre lien disjonctif, particulier Ă ce Un sĂ©parateur, signifiant de l'articulation signifiante comme identification participe Ă la transmission d'Eros comme instinct, part d'immortalitĂ© de la libido, part du rapport entre vivant et , la libido est immortelle, puisque elle se transmet Ă travers les gĂ©nĂ©rations, mais si la mĂ©diation de la parole de fils Ă fils, de sujet Ă sujet, câest inscrire l'articulation signifiante comme possible, cela ne peut l'ĂȘtre que grĂące Ă ce que Freud intitule â repas totĂ©mique â, un maximum de libido sây dĂ©ploie sous la forme de la dĂ©voration du pĂšre primordial dit pĂšre de la Il me semble que la pulsion orale n'est lĂ intĂ©ressĂ©e pour Freud que comme opĂ©rateur permettant la mise en place d'une mĂ©taphore, celle prĂ©cisĂ©ment de l'antĂ©cĂ©dence la plus antĂ©cĂ©dente qui soit. Ce serait lĂ lâhabillage qui convient au stade psychique le plus archaĂŻque lâoralâŠCar cette identification primordiale au pĂšre, nommĂ©e Einverleibung/incorporation par Freud est celle du d'ĂȘtre Ă ĂȘtre . Elle est telle que nulle clinique ne peut la rendre perceptible, qu'elle n'est pas pulsionnelle. Elle Ă©voque le corps en morceau distribuĂ© sous la forme d'un lien d'amour au pĂšre, mais qui prĂ©cisĂ©ment occupe la place d'un signifiant, celui du lien premier au signifiant de l'articulation, signifiant qui ne produit aucun sujet, car nulle subjectivitĂ© ne peut en tĂ©moigner, de cette ouvre la nĂ©cessitĂ© de la topologie puisqu'elle procĂšde de la supposition comme telle d'un sujet d'avant toute question du sujet, comme autre lieu avec sa logique topo-logie, qui ouvre la question de l'ĂȘtre du sujet en tant que manque premier dans la parole, manque premier en rapport avec cette absence radicale du-pĂšre, au dĂ©part. Absence signifie sa mort par le meurtre symbolique comme lâindiquent les termes dâacting out et dâhĂ©ritage archaĂŻque. N'est-ce pas cela qui a pu faire parler de pessimisme ou d'athĂ©isme chez Freud?Le monothĂ©isme de son â Moise » , ne signifie-t-il pas l'inexistence de Dieu, d'oĂč la nĂ©cessitĂ© de son Ă©criture sous la forme de ce Un sĂ©parateur, qui indique que s'il y en avait vraiment Un, alors chacun en aurait un et nous serions tous polythĂ©istes...La topologie permettrait-elle alors de faire procĂ©der la psychanalyse plus du cĂŽtĂ© de la science dont elle serait dans le cortĂšge, plutĂŽt que dans l'ordre du mythe ou de la religion?AdossĂ©e Ă la religion elle marche avec la ainsi ne se dĂ©finirait-il pas comme la lieu dâune trace absente dont la marque absentifie la mort dans lâinconscient, la mort du pĂšre, et ce manque premier fonde cette trace mĂȘme .Absentiifie la mort dans lâ savoir qu'Ă partir de cette identification toute primordiale et des deux autres trait unaire dans la dialectique phallique de l'avoir ou de l'ĂȘtre, et identification hystĂ©rique de dĂ©sir Ă dĂ©sir s'agence la fonction phallique qui est l'assumation par le sujet iPrĂ©cisons cette1ere identification , c est la bĂ©ance du pĂšre primordial, trouthĂ©isme, qui lance la supposition de l'antĂ©cĂ©dence de cette toute premiĂšre identification au pĂšre incorporĂ©, frappĂ©e de son Ă©chancrure primordiale. Et qui va alors persister dans tout signifiant quel qu'il soit, une fois l'organisation du moi achevĂ©e. C'est cela que Jacques Lacan, selon moi, appelle sinthome par rapport au symptĂŽme, du fait de l'acte de nomination du symptĂŽme qui de morbide chez le nĂ©vrosĂ© devient indice de la proximitĂ© la plus proche du pur cristal cette antĂ©cĂ©dence, sâinstaure le signifiant comme Ă©lĂ©ment constitutif du discours, du fantasme du sujet. Câest un acte de nomination de la structure pour un sujet singulier, voilĂ la fonction du signifiant du nom du Ă dire que par cette antĂ©cĂ©dence, il y aurait Ă©quivalence entre les sexes face Ă ce point de bĂ©ance 1ere, point qui se transporte au niveau des autres identifications. Pour les quidam bonhommes et bonne femmes, le sinthome de l'homme va-t-il ĂȘtre â la femme â sans symĂ©trie du cotĂ© cotĂ© femme ce sinthome a des dĂ©mĂȘlĂ©s avec ce qui fait plutĂŽt â ratage â.Mon hypothĂšse est alors la suivante il y aurait une identification quatriĂšme formĂ©e de l'ensemble du nouage des trois identifications de Freud. Osons l'appeler identification Ă la structure articulĂ©e Ă ce manque premier oĂč le pĂšre primordial serait en opposition non symĂ©trique mais polaire au symptĂŽme. SymptĂŽme qui pour l'analyste devient sinthome et s'Ă©quivaut Ă ce qui sâinstaure comme fin dâune analyse et ouvre alors Ă la pratique de la est de savoir que la pratique de l'analyse implique pour l'analyste, qu'il le veuille ou non, de se retrouver en position de complĂ©mentation non homogĂšne au symptĂŽme du nĂ©vrosĂ©. Savoir y faire avec son sinthome en fin de cure câest savoir distinguer sinthome et structure, soit faire repĂ©rage du sinthome pour lâ reprends par cette identification premiĂšre au pĂšre idĂ©al mort qui initie les autres identifications, et les traverse, surgit le fait que tout signifiant vĂ©hiculera cette initiation premiĂšre Ă ne pouvoir se signifier lui-mĂȘme, frappĂ© qu'il est de cette Ă©chancrure inaugurale. Ainsi le sujet va-t-il rĂ©pondre Ă ce qui le marque par ce dont le signifiant si la pratique de la psychanalyse s'Ă©quivaut Ă la pratique du sujet comme sujet de l'inconscient, il faut de l'analyste en fonction pour en repĂ©rer les effets. Mais cette perte initiale comme cause de l'inconscient n'est pas l'objet petit a, mais de l'ordre de l'apulsionnel, soit comme l'incorporation la fonction sinthome du pĂšre est apulsionnelle du fait du ratage dans la rĂ©pĂ©tition de la rencontre avec le rĂ©el. Ainsi comprenons-nous, une citation de Lacan â le pĂšre en tant que pĂšre, c'est-a-dire nul ĂȘtre conscient SĂ©minaire Les fondements de la psychanalyse, p. 58. Ni inconscient donc⊠ouktepapopaVoilĂ comment il me semble pouvoir articuler la fonction du pĂšre Ă la pratique de la psychanalyse, pratique Ă repĂ©rer dans une dynamique, Ă rĂ©inventer sans cesse car liĂ©e Ă la fonction de l'imaginaire comme j'ai essayĂ© de le montrer avec la figure exenplifiĂ©e du pĂšre dans E. figure du pĂšre prĂ©cisĂ©ment comme facette du fantasme montre le non-rĂ©prĂ©setitable de la structure en cause dans la pratique et pourtant nĂ©cessite sa supposition, qui est celle du rĂ©el, rĂ©el qui par la pratique se trouve a des consĂ©quences au niveau de la pratique, soit de l'interprĂ©tation L'interprĂ©tation en effet s'articule Ă ce point de rencontre entre symptĂŽme et pĂšre/sinthome, dĂ©finis plus elle implique de la part de l'analyste un silence, celui de ses pulsions, identique Ă celui de l'incorporation du pĂšre, et qui produit une dĂ©sintrication des diffĂ©rents temps des circuits que l'analyste ne peut en aucune maniĂšre accorder de privilĂšge Ă tel ou tel circuit pulsionnel plutĂŽt qu'Ă un autre, ou Ă tel ou tel objet petit a plutĂŽt qu'Ă un autre, sinon au risque de grever la cure d'une maniĂšre est en effet en place de semblant d'objet petit a et non objet petit a proprement LâHomme aux loups », avec l'incident du brillant sur le nez, vision hallucinĂ©e dâune scĂšne originaire insrite au milieu de sa figureâŠ. Vue dans le miroir comme celle de son pĂšre genre PopeyeCela renvoie Ă lâacte de Freud vis Ă vis de lâHomme aux Loups de porter l'interprĂ©tation sur la fin de la cure par une date anticipĂ©e Ă la fin du processus lui-mĂȘme, sorte de scĂšne primitive placĂ©e dans le futur, en place de rĂ©-Ă©dition d'une scĂšne primitive supposĂ©e dans le 1923, l'Ă©pisode de la verrue sur le nez chez l'Homme aux loups cf. sa mĂšre revenant de Russie avec une tache sur son visage, le visage de Freud lui-mĂȘme malade Ă cette date va se marquer par une insurrection de l'objet petit a montrant que Freud n'avait pu dĂ©signer le regard comme objet petit a malgrĂ© ses travaux, aussi bien sur la scĂšne primitive que sur les pulsions exhibitionnistes voyeuristes de sa MĂ©tapsychologie, en le fait que l'articulation pĂšre-sinthome n'a pas pu ĂȘtre inscrite car subissant la forclusion vient spĂ©cifier que Freud a privilĂ©giĂ©, malgrĂ© lui, un circuit pulsionnel, le regard, un objet, l'objet petit a comme regard, sans le lĂ la confirmation que l'interprĂ©tation ne peut s'appuyer que sur cette articulation pĂšre-sinthome comme j'ai essayĂ© de la dĂ©finir. Or c'est cela qui n'a pu avoir lieu dans le cas de l'Homme aux savoir que la pratique s'Ă©quivaut Ă l'inscription des conditions symboliques de la pratique qui sont inhĂ©rentes Ă la position de la part du psychanalyste comme fonction d'ĂȘtre le lieu d'un silence des pulsions, silence Ă©quivalent Ă celui de la structure pur cristal idĂ©al. La position est proprement liĂ©e Ă la dĂ©sintrication des diffĂ©rents objets petit a ce que nous pourrions appeler incorporation de la fonction analyste l'interprĂ©tation vient-elle Ă se distinguer de la symbolisation, de la nomination, distinction ici Ă peine Ă©bauchĂ©e, et qui nĂ©cessite la passe soit , en particulier, une articulation de son analyse personnelle Ă l'expĂ©rience de la pratique de la psychanalyse par l'analyste, soit celui qui en a l'exercice. La nomination analyste, par exemple, dĂ©passe sa fonction de dĂ©signation dâĂȘtre un opĂ©rateur, mais rĂ©vĂšle que cet opĂ©rateur » est en place de signifiant produit par la pratique elle-mĂȘme, câest un forçage symbolique, Ă©rigeant tel concept, tel mot, tel mouvement, etc... au rang de signifiant, soit ayant pour effet de placer sans cesse l'analyste face Ă sa position de sujet de sa division, câest la question persistante de la re-nomination de l'analyste du fait de sa pratique oĂč se dĂ©ploie sa fonction de â ne s'autoriser que de lui-mĂȘme ».VoilĂ pĂšre et pratique liĂ©s ? de lâun vers lâautre et vice versa ?Jean-Jacques Moscovitz[1] ExposĂ© Ă Espace le mars 2014 , en coĂŻncidence avec la journĂ©e mondiale de la femme, [2] ce tete fait suite au travail sur lâEpopĂ©edu refeoulement originaire, Cf blog psychanalyse actuelle
Abstract Index Outline Author's notes Text Bibliography Notes References About the author Abstracts Il sâagit de tirer quelques enseignements de la discussion relativement oubliĂ©e, entre Claude LĂ©vi-Strauss et Jacques Lacan. Le problĂšme porte essentiellement autour de la dĂ©finition de la notion du symbolique pour les deux auteurs puisque cette notion est toujours paradigmatique dans les deux disciplines, que sont lâanthropologie et la psychanalyse, sans pour autant ĂȘtre vĂ©ritablement Ă©quivalente. Il sâagit dâĂ©clairer ces rapports disciplinaires, tant au niveau Ă©pistĂ©mologique quâau niveau historique, notamment Ă partir des donnĂ©es de la clinique psychanalytique, comparables, dans une certaine mesure, aux problĂšmes relatifs au terrain ethnographique. Car au delĂ de leurs diffĂ©rences, la psychanalyse et lâanthropologie, nâontâelles pas en partage le paradigme symbolique contre le rĂ©ductionnisme naturaliste ou cognitivoâcomportemental qui prĂ©tend aujourdâhui monopoliser lâespace de la lĂ©gitimitĂ© Ă©pistĂ©mique ? This article aims to draw some lessons from a relatively forgotten discussion between Claude LĂ©vi-Strauss and Jacques Lacan. The problem is essentially that of the definition of the symbolic order symbolique. Indeed, this notion is always paradigmatic in their respective disciplines, without really being equivalent. Beyond their differences, do not psychoanalysis and anthropology share the symbolic paradigm against a naturalist or cognitive-behavioural reductionism that claims nowadays to monopolize the space of epistemic legitimacy? The article aims to clarify these disciplinary relations, on the epistemic level well as on the historical level, in particular using data from psychoanalytical psychiatry, which are partly comparable to problems relating to ethnographic fieldwork. Top of page Author's notes Je remercie chaleureusement RĂ©mi Bordes, sans qui, le prĂ©sent article nâaurait pas pu voir le jour, ni mĂȘme ĂȘtre Ă©crit. Ce dernier sâinscrit dans lâouvrage collectif quâil a dirigĂ©, Dire les maux 2008. Full text Jâai posĂ© la question suivante â le fonctionnement de la PensĂ©e sauvage, mis par LĂ©viâStrauss Ă la base des statuts de la sociĂ©tĂ©, est un inconscient, mais suffitâil Ă loger lâinconscient comme tel ? Et sâil y parvient, logeâtâil lâinconscient freudien ? Lacan, 1990 [1964] 1 Nous entendons le terme de symbolique, ou de paradigme symbolique », au sens gĂ©nĂ©ral oĂč il sâop ... 1On a souvent tendance Ă oublier quâĂ cette charniĂšre du XIXe et du XXe siĂšcle qui voit lâavĂšnement de nos sciences humaines actuelles, il Ă©tait alors question plutĂŽt de sciences de lâhomme » et non pas de sciences humaines ». Le glissement sĂ©mantique, on le sait, a toute son importance puisquâil signe un changement de paradigme celui dâune anthropologie biologique Ă une anthropologie qui sâintĂ©resse Ă la dimension symbolique1. 2 DâaprĂšs ces doctrines, le trouble psychique Ă©tait dĂ» Ă processus neuroâdĂ©gĂ©nĂ©ratif. 3 Il faut rappeler que Durkheim, fondateur de la sociologie, tout comme Ribot, fondateur de la psyc ... 2Or historiquement, la psychanalyse occupe une place assez singuliĂšre parmi les autres sciences humaines » elle se tient, pourraitâon dire, sur le front » dâun champ de bataille par lequel cellesâci se dĂ©tachĂšrent du paradigme naturaliste. En effet, Ă lâĂ©poque de Freud, le monopole de la lĂ©gitimitĂ© psychiatrique Ă©tait dĂ©tenu par une clinique biomĂ©dicale dominĂ©e par la doctrine de la dĂ©gĂ©nĂ©rescence de Kraepelin, la psychophysiologie et le scientisme en gĂ©nĂ©ral2. LĂ oĂč par dĂ©finition, lâon nâavait affaire quâĂ des corpsâobjets » ou Ă des comportements, la psychanalyse va sâoccuper de la parole du sujet » et introduire la dimension du symbolique. DĂšs son apparition, cette discipline eut certainement, plus que toute autre de ses consĆurs, Ă croiser le fer avec les conceptions naturalistes ou scientistes qui constituaient par dĂ©finition lâhorizon Ă©pistĂ©mologique, oĂč pourtant elle entendait se dĂ©ployer â rappelons que Freud, contrairement Ă la plupart des fondateurs des sciences humaines, nâĂ©tait pas philosophe3, mais mĂ©decin, et il en fut de mĂȘme pour Lacan. Ă cet Ă©gard, lâavĂšnement de lâanthropologie culturelle relĂšve davantage dâune coupure Ă©pistĂ©mologique et institutionnelle que du combat de rue » que dĂ»t mener dans son domaine la psychanalyse, et quâelle doit mener encore Ă lâheure actuelle pour exister elle est dâabord et toujours une immixtion dans le terrain de la psychiatrie biomĂ©dicale, elle est aussi un geste critique contre tout rĂ©ductionnisme scientifique, fĂ»tâil aujourdâhui comportemental ou cognitiviste. Câest Ă partir de cette idĂ©e selon laquelle il existe une certaine exemplaritĂ© Ă©pistĂ©mologique de sa situation que nous souhaitons commencer notre investigation. 3En effet, si lâon admet que la psychanalyse, plus que toute autre discipline, eut Ă sâaffronter aux rĂ©ductionnismes et aux scientismes de toutes sortes et que câest sa condition mĂȘme, lâĂ©lucidation de cette situation, tout en jetant quelques lumiĂšres sur la nature de son paradigme symbolique », ne pourraitâelle pas, par la mĂȘme occasion, jeter aussi quelques lumiĂšres sur le paradigme symbolique » anthropologique ? Car sâil est vrai que le symbolique » du psychanalyste nâest pas exactement la mĂȘme chose que le symbolique » de lâanthropologue, et que se marque par lĂ une grande partie de leurs diffĂ©rences disciplinaires que tous deux dĂ©fendent bien souvent becs et ongles », il nâen demeure pas moins que tous deux reconnaissent Ă cette catĂ©gorie une valeur Ă©pistĂ©mologique fondamentale, ne seraitâce, a minima, que pour se distinguer des perspectives naturalistes, biomĂ©dicales et scientistes. Donc, quâen estâil de cette notion de symbolique » que manipule aussi bien lâanthropologue que le psychanalyste ? Il semble important de revenir aux fondements de ce paradigme, dans la mesure oĂč il est ce qui les rassemble, dâun certain point de vue, en une mĂȘme communautĂ© scientifique ». 4 La citation complĂšte mĂ©rite lâattention pour donner un aperçu de son propos Il nây a pas dâau ... 5 Sur ces questions on se reportera Ă lâexcellente critique de Bernard Juillerat 2001 9-38 conc ... 6 Câest notamment le cas du trĂšs mĂ©diatisĂ© Livre noir de la psychanalyse oĂč les auteurs, aprĂšs avoi ... 7 Comment ne pas voir que les rĂ©cents dĂ©bats autour de lâefficacitĂ© thĂ©rapeutique de la psychanalys ... 4Enfin, last but not least, ce questionnement Ă©pistĂ©mologique fondamental, auâdelĂ de son intĂ©rĂȘt spĂ©cifique, paraĂźt dâautant plus pertinent quâon assiste aujourdâhui prĂ©cisĂ©ment Ă ce quâil faut bien appeler une renaissance du scientisme. Si les sciences humaines purent sâen dĂ©faire au cours de la premiĂšre moitiĂ© du XXe siĂšcle comme nous lâavons Ă©voquĂ©, force est de constater quâil est de nouveau de mode dans toutes les disciplines. On le trouve aussi bien Ă lâĆuvre dans lâanthropologie cognitiviste, telle celle que Dan Sperber dĂ©veloppe depuis les annĂ©es 90 Sperber, 1987, 1996, et selon laquelle il nây a pas dâexception aux lois de la physique » puisque dans le social, on est confrontĂ© au mĂȘme matĂ©riel »4 de telles dĂ©clarations laissent songeurâŠ5, quâen psychologie, oĂč se dĂ©veloppe lâapproche cognitivoâcomportementaliste. Par exemple, pour Varela ou Dortier, lâinconscient ne peut ĂȘtre que cognitif, câestâĂ âdire confondu avec les automatismes mentaux » Dortier, 1999 ; Varela, Thompson & Rosch, 1999. Il est Ă©vident que ces courants relĂšvent dâun phĂ©nomĂšne rĂ©pandu. Il sâagit explicitement dâĂ©radiquer la psychanalyse du champ de la lĂ©gitimitĂ© Ă©pistĂ©mologique et clinique6, tout comme lâanthropologie cognitive cherche Ă arraisonner lâanthropologie culturelle et symbolique. Et nâestâce pas ce que fait aussi la biomĂ©decine lorsque, contre lâanthropologie mĂ©dicale, elle prĂ©tend garder le monopole de la lĂ©gitimitĂ© thĂ©rapeutique ? Ce sont les mĂȘmes tendances que lâon constate dans le champ psy » et dans le champ anthropologique7. Les interrogations Ă©pistĂ©mologiques que nous tenterons de soulever sont donc dâautant plus dâactualitĂ© que tous ces nouveaux » courants partagent un certain idĂ©al de science avec les sciences naturelles, duquel nos disciplines se distinguent. Ce questionnement sur le paradigme symbolique sâinscrit dans une certaine urgence par rapport Ă un contexte thĂ©orique et politique dont on comprendra que lâon ne pouvait le passer sous silence. 8 Câest le cas dâune lecture qui semble devenir frĂ©quente et qui, mĂȘme si elle est incontestablemen ... 9 En effet, les rapports de Lacan Ă LĂ©viâStrauss ont dĂ©jĂ Ă©tĂ© remarquablement explorĂ©s mais de mani ... 5Il se trouve que la dĂ©finition de cette fonction symbolique » fut discutĂ©e par deux des figures les plus illustres de lâanthropologie et de la psychanalyse Lacan et LĂ©viâStrauss. On a gĂ©nĂ©ralement coutume dâassocier ces deux Ćuvres sous la houlette du paradigme structuraliste8 ainsi certaines divergences pourtant essentielles, qui tiennent Ă une certaine vision du langage, des mots et de leur rapport Ă la vĂ©ritĂ©, ne sont pas explorĂ©es9. Câest la raison pour laquelle nous reprendrons certains aspects mĂ©connus de la discussion disciplinaire qui eut lieu entre Lacan et LĂ©viâStrauss, autour de la dĂ©finition de cette fonction symbolique ». PrĂ©cisons dâemblĂ©e quâil ne sâagit Ă©videmment pas de rĂ©duire lâanthropologie Ă LĂ©viâStrauss, ni la psychanalyse Ă Lacan il sâagit simplement de reprendre un dĂ©bat dont certains aspects semblent relativement oubliĂ©s, alors quâils sont nĂ©anmoins sans doute des plus fructueux et des plus propices pour tenter dâĂ©clairer certains problĂšmes Ă©pistĂ©mologiques fondamentaux dans nos disciplines, et notamment celle de leur scientificitĂ©. 10 On ne prĂ©sentera pas ici lâensemble des recherches dâanthropologie psychanalytique qui furent men ... 6Les rapports de lâanthropologie et de la psychanalyse, on le sait, furent houleux, parfois fĂ©conds10. Malheureusement, ils furent le plus souvent de part et dâautres marquĂ©s par le sceau du soupçon. Pourtant, on ne peut nier une certaine similaritĂ© entre les deux dĂ©marches la situation ethnographique vise Ă explorer les contextes qui permettent de rendre intelligibles les savoirs et les pratiques dâun groupe social ; lâapproche analytique opĂšre, en quelque sorte, de la mĂȘme maniĂšre par rapport au sujet car quâestâce donc que la clinique sinon son terrain » ? 11 Depuis Lâoedipe africain dâOrtigues 1966 la psychanalyse inspirĂ©e de Lacan nâa pas exprimĂ© gran ... 7Une des rĂ©centes tentatives pour fonder une nouvelle anthropologie psychanalytique » a proposĂ© un socle Ă©pistĂ©mologique Ă partir duquel il sâagissait de dĂ©finir la pertinence dâun croisement des deux disciplines Bidou, 2001 ; Juillerat, 2001 ; Galinier, 1997. Mais tout en reconnaissant le mĂ©rite Ă©vident de ce projet, on remarque que cette initiative Ă©mane dâabord dâanthropologues qui sâintĂ©ressent Ă la psychanalyse, et non lâinverse. Câest ainsi que leur point de vue nâest pas dâabord clinique, ce que lâon ne saurait Ă©videmment leur reprocher. De plus, la rĂ©fĂ©rence Ă Lacan est relativement peu exploitĂ©e11. Or, sans pour autant succomber au lacanoâcentrisme », nous voudrions montrer ici que, dans la clinique telle que lâĂ©labora Lacan, rĂ©sident des enjeux Ă©pistĂ©mologiques cruciaux et assez irrĂ©ductibles concernant la nature du symbolique ». Loin de pouvoir ĂȘtre rapportĂ©s Ă lâĂ©pistĂ©mologie de LĂ©viâStrauss, ces deniers ne sont pas sans rappeler les questionnements rĂ©flexifs relatifs Ă lâobtention des donnĂ©es de terrain soulevĂ©es par les anthropologues contemporains. 12 On pense ici notamment Ă lâouvrage de FavretâSaada qui fit date, Les mots, la mort, les sorts l ... 8En effet, pour Ă©rudits quâil furent, les anthropologues fondateurs, Ă©taient avant tout des anthropologues de cabinet » ils compilaient les donnĂ©es collectĂ©es par dâautres, Ă partir desquelles ils Ă©chafaudaient leurs thĂ©ories. Or cette posture mĂ©thodologique » ne fut pas sans effet, et câest peutâĂȘtre lâanthropologie contemporaine ou plus particuliĂšrement celle que lâon appelle postmoderne â Favret-Saada, 197712 qui dĂ©masqua le plus brillamment les illusions de lâancienne mĂ©thode en exhibant les questions problĂ©matiques du terrain ethnographiques. Non seulement les catĂ©gories sociales classiques ne sont pas lĂ©gitimes puisquâelles tendent Ă rĂ©ifier les agents sociaux, mais de surcroĂźt ces derniers sâavĂšrent aussi ĂȘtre des acteurs capables de stratĂ©gies et impliquĂ©s dans des jeux de langage dans lequel lâethnologue, luiâmĂȘme, se trouve pris. Or, on peut avancer quâĂ lâinstar du terrain ethnographique tel quâil se pratique aujourdâhui, la possibilitĂ© de toute clinique repose prĂ©cisĂ©ment sur de semblables jeux de langage et sur la place quây prennent le sujet et son analyste. On pourrait dire que, en quelque sorte, câest ce que Lacan explorera notamment sous le thĂšme de lâĂ©thique de la psychanalyse ». Mais ce questionnement nâĂ©tait-il pas inĂ©luctable Ă partir du moment oĂč le pĂšre fondateur de la psychanalyse, invente sa discipline prĂ©cisĂ©ment au contact de son terrain », la clinique de lâhystĂ©rie Freud, 1895 ? 13 Mieux encore, comme on le sait, elleâmĂȘme en dĂ©pend la production des faits de laboratoire sâin ... 9De ce dernier point de vue, on ne peut nier que lâapproche biomĂ©dicale comme lâapproche cognitivoâcomportementale du sujet semblent bien Ă©loignĂ©es de cette commune perspective dâune part, elles ne permettent pas de rendre compte de la complexitĂ© Ă©laborĂ©e par les acteurs sociaux, complexitĂ© qui sâinscrit dâabord dans des faits de langage, de langue et de parole13; dâautre part, elles nient leur place subjective. Ces approches se rĂ©vĂšlent en cela dĂ©positaires dâune conception Ă©pistĂ©mologique dangereusement naĂŻve, dont on verra que la conception de la fonction symbolique de LĂ©viâStrauss nâest pas exempte. En dâautres termes, lĂ oĂč LĂ©viâStrauss Ă©choue comme le montra la critique postmoderne, Lacan reste dâactualitĂ©. 10Nous rappellerons dâabord les enseignements de lâexpĂ©rience clinique psychanalytique sur la question de la parole du sujet. Puis nous aborderons la conception du symbolique chez LĂ©viâStrauss que nous comparerons avec celle de Lacan. Enfin, nous essaierons de dĂ©gager quelques perspectives Ă partir des avancĂ©s proposĂ©es par lâanthropologie postmoderne et leurs implications pour la psychanalyse dans un ultime renversement si la psychanalyse traque les illusions, ne peutâon pas voir, en regard de certaines recherches contemporaines, quâelle nâen nâest pas elleâmĂȘme exempte ? La parole du sujet 14 Comme nous le verrons Lacan dĂ©veloppe un certain rapport de la psychanalyse Ă la science. Il ne s ... 11Il y a une chose de laquelle le psychanalyste ne saurait se dĂ©tourner sans se renier luiâmĂȘme la clinique. Câest certainement un curieux paradoxe, comme nous lâavons indiquĂ© en prĂ©ambule, que la clinique psychanalytique ait pu apparaĂźtre, puis fleurir », sur la terre aride dâune psychiatrie exclusivement biomĂ©dicale. Si le scientisme imposait au mĂ©decin cet Ă©tonnant mĂ©pris de la rĂ©alitĂ© psychique [âŠ], câest aussi dâun mĂ©decin que devait venir la nĂ©gation du point de vue lui-mĂȘme »14 en tant quâil est le praticien par excellence de la vie intime » Lacan, 1966b. Câest Freud, qui fit ce pas fĂ©cond sans doute parce quâainsi quâil en tĂ©moigne dans son autobiographie, il y fut dĂ©terminĂ© par son souci de guĂ©rir [âŠ] » idem. 12Aussi, Ă lâinstar des autres sciences humaines, la psychanalyse se dĂ©tache du paradigme anthropologique naturaliste de lâĂ©poque pour des raisons singuliĂšres il sâagit des exigences cliniques. Freud prend au sĂ©rieux la plainte de ses patientes, et paradoxalement ce sont elles qui vont lâenseigner. LâĂ©vanouissement de ses patientes ne relĂšve pas dâune causalitĂ© organique, il sâagit en quelque sorte dâune maladie par reprĂ©sentation » Laplanche & Pontalis, 1967 qui se caractĂ©rise par le mĂ©canisme de conversion » Freud, 1894 [âŠ] ce qui spĂ©cifie les symptĂŽmes de la conversion, câest leur signification symbolique ils expriment par le corps, des reprĂ©sentations refoulĂ©es » Laplanche & Pontalis, op. cit.. 13Câest ainsi quâaprĂšs lâhypnose et lâenjeu cathartique de la cure, afin de sâĂ©carter de la suggestion, câest la talking cure qui sâimpose. Seule la parole tĂ©moigne de la rĂ©alitĂ© psychique de lâhystĂ©rique. Ainsi, il va leur rendre la dignitĂ© de sujet de laquelle elles Ă©taient gĂ©nĂ©ralement dĂ©chues dans ces lieux en les Ă©coutant. 15 Cette affirmation mĂ©riterait bien entendu de plus longs dĂ©veloppements, que nous nâavons pas les ... 16 CâestâĂ âdire au sens oĂč lâon parle dâune science physique. 14Cette attention au sujet est le rĂ©quisit clinique de la psychanalyse. Lâintroduction de la dimension symbolique en tant que causalitĂ© irrĂ©ductible Ă une causalitĂ© organique au sein de lâinstitution asilaire passe par la figure du psychanalyste, et plus tard du psychologue. Câest lĂ , en quelque sorte, un humanisme le psychanalyste est un humaniste Ă lâhĂŽpital, ce qui est une vĂ©ritable rĂ©volution copernicienne dans le champ des pratiques asilaires15. Ainsi, si lâĂ©coute psychanalytique ne se fait pas au hasard, elle ne relĂšve pas de la science au sens moderne du terme16. Elle semble mĂȘme revĂȘtir certains aspects anti-mĂ©thodiques Nous ne devons attacher dâimportance particuliĂšre Ă rien de ce que nous entendons et il convient que nous prĂȘtions Ă tout la mĂȘme attention "flottante", suivant lâexpression que jâai adoptĂ©. On Ă©conomise ainsi un effort dâattention⊠et on Ă©chappe ainsi au danger insĂ©parable de toute attention voulue, celui de choisir parmi les matĂ©riaux fournis. Câest en effet ce qui arrive quand on fixe Ă dessein son attention lâanalyste grave en sa mĂ©moire tel point qui le frappe en Ă©limine tel autre, et ce choix est dĂ©terminĂ© par des expectatives et des tendances. Câest justement ce quâil faut Ă©viter ; en conformant son choix Ă son expectative, lâon court le risque de ne trouver que ce que lâon savait dâavance. En obĂ©issant Ă ses propres inclinations, le praticien falsifie tout ce qui lui est offert » Freud, 1999. 15En dâautres termes, cette mĂ©thode particuliĂšre dâĂ©coute place la psychanalyse dans un rapport au savoir et Ă la science qui est inĂ©dit. En effet, le mĂ©decin doit faire fi de son savoir pour sâouvrir Ă la singularitĂ© du sujet, Ă sa vĂ©ritĂ©, et dans cette quĂȘte, la parole seule est son alliĂ©. Le thĂ©rapeute nâest pas lâheureux bĂ©nĂ©ficiaire dâune science qui correspondrait au rĂ©el de la souffrance qui se prĂ©sente Ă lui et quâil conviendrait, suivant certains arrangements, dâajuster ici et lĂ , en fonction de la particularitĂ© dâun sujet. Ă lâinstar dâun certain nombre de philosophies classiques du doute de Descartes, Ă lâĂ©pochĂš dâHusserl, le geste de lâanalyste est celui de la suspension du savoir admis. Celuiâci, pour entendre et bien entendre câestâĂ âdire Ă©couter, doit oublier son savoir, en faire table rase. Loin dâincarner le maĂźtre des significations qui trĂŽnerait en majestĂ© du haut de son savoir, loin dâĂȘtre le dĂ©positaire dâun sens qui pourrait se rĂ©soudre dans une Ă©conomie enfin rĂ©alisĂ©e, il est, lui aussi, partie de cet espace qui sâinaugure dans la sĂ©ance. Le psychanalyste ne peut, tel Ulysse attachĂ© Ă son mĂąt, jouir du spectacle des sirĂšnes sans risques et sans en accepter les consĂ©quences » Blanchot citĂ© par Barthes, 1995b. Lâespace analytique nâappartient pas en propre Ă lâanalyste mais le dĂ©passe dans un jeâneâsaisâquoi » mais câest dans cette irrĂ©ductibilitĂ© que la guĂ©rison pourra trouver ses voies Ă venir. Le savoir ne rĂ©sout pas la clinique, la pratique lui Ă©chappe inlassablement. Ainsi, si le savoir psychanalytique possĂšde quelque consistance, il la trouve parce quâil est ouvert sur une pratique qui le met toujours en demeure. 16Câest la raison pour laquelle lâassociation libre implique de tout dire » selon une loi de nonâomission dans la mesure oĂč tout Ă©lĂ©ment peut ĂȘtre porteur de signification loi de non systĂ©matisation. On ne peut nier que les rĂšgles de cette Ă©coute vont Ă lâencontre de lâidĂ©al de science. GuĂ©rir par les mots, câest une activitĂ© par oĂč [âŠ] il faut reconnaĂźtre lâintelligence mĂȘme de la rĂ©alitĂ© humaine, en tant quâelle sâapplique Ă la transformer » Lacan, 1966b. Le psychanalyste cherche Ă apprendre et Ă faire apprendre au sujet Ă reconnaĂźtre son histoire. Il sâagit, ni plus ni moins dâ [âŠ] aider le sujet Ă parfaire lâhistorisation actuelle des faits qui ont dĂ©terminĂ© dĂ©jĂ dans son existence un certain nombre de tournants historiques. Mais sâils ont eu ce rĂŽle, câest dĂ©jĂ en tant que faits dâhistoire, câestâĂ âdire en tant que faits reconnus dans un certain sens ou censurĂ©s dans un certain ordre » Lacan, 1966a. Ainsi, lâĂ©coute psychanalytique suppose que le psychanalyste sache entendre ce que le discours du patient veut dire un silence peut devenir signifiant, le rĂ©cit dâune histoire quotidienne peut ĂȘtre pris pour un apologue et un lapsus peut ĂȘtre la marque dâun dĂ©sir. On parlera de la ponctuation » heureuse du psychanalyste qui vient faire signe au discours du patient afin de porter Ă sa conscience les nĆuds par lesquels il se trouve coincĂ© ». La raison en est que lâinconscient est le chapitre censurĂ© de lâhistoire du sujet. Ainsi lâanamnĂšse psychanalytique, les conjectures sur le passĂ© du patient nâont dâautre but que de libĂ©rer lâavenir, de dĂ©nouer la souffrance lâeffet dâune parole pleine est de rĂ©ordonner les contingences passĂ©es en leur donnant le sens des nĂ©cessitĂ©s Ă venir, telles que le constitue le lieu par oĂč le sujet les fait prĂ©sentes » ibid..Câest lĂ tout le propos de la psychanalyse reconstruire lâhistoire du sujet dans sa parole. Car ni le dĂ©sir, ni lâhistoire ne sont dĂ©terminĂ©s par la nature. Les pĂ©ripĂ©ties de la subjectivitĂ© ne sont que des stigmates historiques et jamais des stades instinctuels. Dans cette hĂŽtellerie du signifiant » lâĂ©coute du psychanalyste aboutit Ă une reconnaissance celle du dĂ©sir de lâautre Barthes, 1995a. 17On voit bien que lâespace analytique est irrĂ©ductible au savoir qui pourtant a permis de lâouvrir. Câest sous le signe de la singularitĂ© que se joue la thĂ©rapie, et câest sous ce signe Ă©trange, qui traverse dans son entier le corps de lâespace analytique, que le thĂ©rapeute luiâmĂȘme se trouve. On pourrait mĂȘme dire, non sans quelque provocation, que lui et son patient sây trouvent de ce point de vue logĂ©s Ă la mĂȘme enseigne. 18Ainsi, [âŠ] lâexpĂ©rience analytique nâest pas dĂ©cisivement objectivable. Elle implique toujours au sein dâelleâmĂȘme lâĂ©mergence dâune vĂ©ritĂ© qui ne peut ĂȘtre dite, puisque ce qui la constitue câest la parole, et quâil faudrait en quelque sorte dire la parole elle-mĂȘme, ce qui est Ă proprement parler ce qui ne peut pas ĂȘtre dit en tant que parole » Lacan, 1953. Il y a donc une disjonction entre le savoir scientifique » et la vĂ©ritĂ© de la parole », qui est au cĆur de la clinique psychanalytique et qui se trouve posĂ©e comme condition de son avĂšnement. 19Ăvidemment, une telle prĂ©sentation de la psychanalyse Ă©loigne grandement celleâci de lâanthropologie classique. La psychanalyse sâoccupe de la singularitĂ© du sujet, dans un savoir dont la formalisation scientifique semble bien dĂšs lors sâavĂ©rer impossible, alors que lâanthropologie sâoccupe des reprĂ©sentations collectives, dont elle prĂ©tend ĂȘtre Ă mĂȘme de rendre compte, voire de formaliser. DĂšs lors, si la psychanalyse ne relĂšve pas du savoir de la science, on comprend quâelle puisse ĂȘtre conçue par lâanthropologie comme une pratique qui relĂšve dâune simple efficacitĂ© symbolique », au mĂȘme titre que de nombreuses autres institutions humaines que lâanthropologue est amenĂ© Ă dĂ©crire. Nous commençons par lĂ Ă entrer dans le cĆur de ce que nous appellerons volontairement la polĂ©mique » de Lacan et de LĂ©viâStrauss. En choisissant un tel terme, il sâagit de se dĂ©marquer de lâidĂ©e selon laquelle ces deux auteurs seraient en accord ou que lâon pourrait ramener lâun Ă lâautre. Ă mettre trop lâaccent sur un certain structuralisme thĂ©orique quâils partagĂšrent un temps, on oublie quâailleurs se jouaient certaines diffĂ©rences essentielles qui allaient marquer le destin des disciplines. Le chaman et le psychanalyste anthropologie de la psychanalyse 17 AuâdelĂ de leurs diffĂ©rences, ces deux auteurs plutĂŽt tenus Ă lâĂ©cart du dĂ©bat aujourdâhui post ... 20La rĂ©fĂ©rence est connue. LĂ©viâStrauss fait une comparaison du chaman avec le psychanalyste en 1949 dans un article intitulĂ© LâefficacitĂ© symbolique », quâil dĂ©die Ă Ferdinand de Saussure 1949a. ConfrontĂ© Ă la mystĂ©rieuse efficacitĂ© de la cure chamanique, lâanthropologue dĂ©veloppe une explication intellectualiste, sâĂ©cartant des approches anthropologiques classiques de la magie des annĂ©es trente LĂ©vyâBruhl, 1922 ; De Martino, 199917. 21La cure opĂ©rĂ©e par le chaman consiste, selon LĂ©viâStrauss, Ă rendre pensable » et acceptable » une situation insupportable pour le patient qui souffre » dans son corps. Lâintervention du chaman va consister Ă intervenir de telle sorte Ă rĂ©soudre le conflit. Pour LĂ©viâStrauss, le chaman est une sorte de mĂ©diateur entre le rĂ©el dâun corps qui souffre et le dĂ©sarroi psychique du malade. Il sâagit pour lui, par le truchement de son discours mythologique, de donner une forme narrative Ă la maladie rĂ©elle. Que la mythologie du chaman ne corresponde pas Ă une rĂ©alitĂ© objective ne compte pas, rajoute LĂ©viâStrauss ce qui compte, câest que le malade et la communautĂ© y croient. 22Alors que dans la biomĂ©decine, lâexplication faite au patient de la cause de son dĂ©sordre, recourant Ă des Ă©lĂ©ments extĂ©rieurs comme les sĂ©crĂ©tions et les microbes, induit peu dâeffets sur sa guĂ©rison, le discours mythologique du chaman qui dĂ©signe monstres et esprits malfaisants comme cause de la maladie, lui, guĂ©rit. Ătrange paradoxe, commente LĂ©viâStrauss, dont la raison tient Ă ce que dans un cas les relations de cause Ă effet sont extĂ©rieures Ă lâesprit du patient, tandis que dans lâautre les relations de cause Ă effet sont internes Ă lâesprit. Le chaman fournit Ă sa patiente un langage qui permet de symboliser la souffrance. Alors que celleâci Ă©tait inexplicable, quâelle venait perturber lâordre naturel, lâintervention du chaman consiste Ă la rĂ©inscrire dans lâordre symbolique. Le chaman, par lâexpression verbale et lâexpĂ©rience que permet son intervention, procĂšde ni plus ni moins Ă une rĂ©organisation symbolique qui a pour issue un dĂ©blocage du processus physiologique. 18 Le concept dâabrĂ©action se trouve essentiellement valorisĂ© dans les premiĂšres Ă©laborations thĂ©ori ... 23Ces considĂ©rations sur lâefficacitĂ© symbolique de la cure chamanique amĂšnent LĂ©viâStrauss Ă la comparer aux ressorts de la technique psychanalytique freudienne. En effet, ne se propose tâon pas dans les deux cas dâamener Ă la conscience des conflits et des rĂ©sistances restĂ©s jusque-lĂ inconscients ? Dans les deux cas, la rĂ©solution des conflits ne se fait pas en raison de la connaissance de la cause objective de la maladie, mais bien grĂące Ă une expĂ©rience au cours de laquelle les Ă©vĂ©nements se rĂ©alisent dans un ordre et sur un plan qui permettent leur libre dĂ©roulement et conduisent Ă leur dĂ©nouement ». Cette expĂ©rience vĂ©cue en psychanalyse, poursuit LĂ©viâStrauss, sâappelle abrĂ©action »18. Le psychanalyste intervient de maniĂšre non provoquĂ©e » par lâintermĂ©diaire du transfert dans les conflits du malade. Il peut dĂšs lors expliciter une situation restĂ©e informulĂ©e. AuâdelĂ de leurs diffĂ©rences que LĂ©viâStrauss ne nie pas dans un premier temps le chaman est un orateur », tandis que le psychanalyste est un auditeur » dâaprĂšs lui, et que, dâautre part, le nĂ©vrosĂ© liquide un mythe individuel » lorsque lâindigĂšne se rĂ©inscrit dans une mythologie collective », nous retrouvons donc dans la figure du psychanalyste le mĂȘme opĂ©rateur que dans celle du chaman. Tous deux agissent en raison du ressort de lâefficacitĂ© de la fonction symbolique. Mais comment rendre compte de lâharmonie du parallĂ©lisme entre mythe et opĂ©rations rĂ©elles ? Comment expliquer que la narration mythologique puisse agir dans la rĂ©alitĂ© objective ? 24Pour rĂ©pondre Ă cela, LĂ©viâStrauss fait lâhypothĂšse dâun isomorphisme anthropologique lâefficacitĂ© symbolique consisterait prĂ©cisĂ©ment dans cette propriĂ©tĂ© inductrice que possĂ©derait les unes par rapports aux autres, des structures formellement homologues pouvant sâĂ©difier, avec des matĂ©riaux diffĂ©rents, aux diffĂ©rents Ă©tages du vivant processus organique, psychisme inconscient, pensĂ©e rĂ©flĂ©chie. La mĂ©taphore poĂ©tique fournit un exemple familier de ce procĂ©dĂ© inducteur » 25LĂ©vi-Strauss ose lĂ une certaine audace Ă©pistĂ©mologique, en Ă©voquant un tel procĂ©dĂ© inducteur ne pourraitâon pas parler Ă cet Ă©gard de mythopoiĂšsis » au sens oĂč en un certain point la nature les processus organiques rejoint les dĂ©terminismes symboliques de la culture ? Ăvoquant la thĂ©orie linguistique du rapport de signifiant au signifiĂ© pour rendre compte de la relation de lâefficacitĂ© symbolique comme relation de symbole Ă chose symbolisĂ© », la question porte peutâĂȘtre ici sur le statut du signifiĂ© chez LĂ©viâStrauss. LĂ©viâStrauss ne suppose t-il pas en effet dans une certaine mesure la possibilitĂ© dâun signifiĂ© de la nature » ? Pour sa part, si la psychanalyse ne rĂ©cuse pas la mĂ©taphore poĂ©tique, la question se pose de sa dĂ©termination ou de son extension. 26TrĂšs tĂŽt, Lacan va prĂ©ciser sa position sur cette question du dĂ©terminisme symbolique tout dâabord, comme nous allons le voir, en complexifiant le symbolique promut par LĂ©viâStrauss en introduisant sa catĂ©gorie de lâimaginaire, espace irrĂ©ductible du sujet ; puis en dĂ©veloppant la question du symbolique comme relevant exclusivement du langage, de la parole, ou du signifiant. Câest ainsi quâil coupera court Ă la causalitĂ© biologique lĂ oĂč lâon va voir que LĂ©viâStrauss penche sĂ©rieusement en la faveur des processus organiques ». Nous allons suivre pas Ă pas lâĂ©mergence de ce dĂ©saccord. La rĂ©ponse » de Lacan parole du sujet et langage de la science en psychanalyse 27DĂšs Le stade du miroir⊠» de 1949, Lacan introduit la notion dâefficacitĂ© symbolique » de LĂ©viâStrauss. Mais il commence dĂ©jĂ Ă la dĂ©former ». Sâagitâil par lĂ pour Lacan de rĂ©sister Ă la tentation naturaliste de LĂ©viâStrauss ? Toujours estâil quâil complexifie le problĂšme en introduisant une nouvelle dimension la dimension imaginaire » qui a rapport Ă la relation narcissique ou Ă lâorigine imaginaire du moi il sâagit du fameux stade du miroir ». On remarquera que cette notion dâ imaginaire » nâexclut pas la dimension du symbolique » mais sây articule. On peut dire que la notion dâimaginaire permet Ă Lacan de dĂ©placer le problĂšme quant Ă la nature de la dimension symbolique, tout en spĂ©cifiant le levier opĂ©ratoire de la psychanalyse. Il y a pour lui une fonction inaugurale de lâimage spĂ©culaire chez lâhomme qui spĂ©cifie son rapport Ă la nature » et du mĂȘme coup lâen Ă©loigne radicalement. Lacan rĂ©pond donc indirectement Ă lâhypothĂšse de lâisomorphisme de maniĂšre tranchĂ©e Ă ce point de jonction de la nature et la culture que lâanthropologie de nos jours scrute obstinĂ©ment, seule la psychanalyse reconnaĂźt ce nĆud de servitude imaginaire que lâamour doit toujours redĂ©faire ou trancher » Lacan, 1966d. 19 » Pour les imagos, en effet, dont câest notre privilĂšge que de voir se profiler, dans notre expĂ©r ... 28La relation de lâhomme Ă la nature est dâabord marquĂ©e par une discontinuitĂ©. Il sâagit dâune discorde primordiale » dont la psychanalyse a le privilĂšge dâapercevoir les mĂ©canismes dans la pĂ©nombre de lâefficacitĂ© symbolique »19. En dâautres termes, pour rendre compte de lâefficacitĂ© symbolique on ne saurait se passer de lâimaginaire du sujet. Lâimaginaire lacanien est donc en quelque sorte une complexification du paradigme symbolique. 29Sâil nâest pas lieu ici de rentrer dans la spĂ©cificitĂ© des catĂ©gories lacaniennes, ni de suivre leur Ă©volution, on peut en revanche remarquer que le dĂ©placement du concept dâefficacitĂ© symbolique lĂ©viâstraussien sera solidaire dâune critique de lâidĂ©al de science que Lacan ne cessera de dĂ©velopper en mĂȘme temps quâil prĂ©cisera le statut de la psychanalyse par rapport Ă la science. Certains problĂšmes se posent en effet si le sujet est dâabord le rĂ©sultat dâImagos, quâen estâil de la nature du discours qui prĂ©tend rendre compte de ces Imagos ? La fonction symbolique ainsi dĂ©viĂ©e et couplĂ©e Ă une dimension imaginaire par la psychanalyse, peutâelle encore prĂ©tendre Ă une quelconque lĂ©gitimitĂ© Ă©pistĂ©mologique, si la vĂ©ritĂ© dĂ©pend toujours avant tout dâun sujet ? Sans succomber Ă la tentation hermĂ©neutique, Lacan ne va faire que radicaliser son geste au fil de son Ćuvre il va ainsi renouveler le rapport de la psychanalyse Ă la question de la science. 20 MalgrĂ© sa tentative et son rapprochement avec Einstein, il nâĂ©chappa au feu de la critique de Pop ... 30Il reprend, en quelque sorte, les questions oĂč Freud en Ă©tait restĂ© et les approfondit. La question que se posait en effet Freud en 1933 Ă©tait en effet la psychanalyse est-elle une Weltanschauung câestâĂ âdire une conception du monde comme lâest la religion ? Ce dernier chercha Ă rĂ©pondre par la nĂ©gative en rattachant la psychanalyse Ă lâĂ©mergence dâune Welt scientifique dans lâhistoire Freud, 198420. Lacan, en prĂ©cise les rapports et sâĂ©carte en partie de lâĂ©volutionnisme scientifique freudien. Si lâavĂšnement de la psychanalyse est effectivement liĂ© Ă la naissance de la science, ce nâest pas en tant quâelle sâinsĂšre dans la logique scientifique mais en tant que son champ relĂšve de ce que la science exclut ou rejette. Sâil sâagit pour la psychanalyse dâouvrir un espace irrĂ©ductible Ă la vĂ©ritĂ© de la parole du sujet, câest en tant quâelle entretient un certain rapport au langage de la science qui est un rapport dâexclusion nĂ©cessaire. Ăvidemment, une telle conception suppose dâĂ©lucider plus prĂ©cisĂ©ment ce rapport de la parole que permet la psychanalyse au langage de la science. 21 Nous reprenons ici les analyses classiques de Milner 2000. 22 Des distinctions sont lĂ encore Ă faire entre le chaman et le psychanalyste. Pour lâun, il sâagit ... 31Que la science ne sâintĂ©resse quâau gĂ©nĂ©ral est un constat qui sâimpose. Saussure par exemple, pĂšre de la linguistique, cherchait, on le sait, Ă fonder la science du langage. Ainsi il fut amenĂ© Ă mettre Ă jour les rĂ©gularitĂ©s et Ă exclure de son champ dâinvestigation toutes les traces de lâirrĂ©gularitĂ© ou de lâaccident singulier ». Or câest prĂ©cisĂ©ment Ă ces irrĂ©gularitĂ©s que la psychanalyse prĂȘte attention, en tant quâelles rĂ©vĂšlent le sujet. En cela, le domaine qui intĂ©resse la psychanalyse nâest pas vraiment la linguistique, mais plutĂŽt ce que Lacan appelle la linguisterie », câestâĂ âdire ce qui a trait Ă la parole du sujet Lacan, 1972. Aussi son investigation se tientâelle Ă la limite de la linguistique qui est Ă©tude du langage Lacan dira dâailleurs de cette derniĂšre quâelle ne fraye rien pour lâanalyse », car le lieu qui lâintĂ©resse nâest pas dâabord celui de la structure au sens dâune structure de langage qui se rĂ©pĂšte, mais le lieu de lâaccident qui la rĂ©vĂšle mot dâesprit ou lapsus langagier qui marquent lâĂ©mergence du sujet et de sa parole21. Sâil y a psychanalyse, câest en tant que celleâci Ă affaire Ă la parole du sujet comme cause, ou encore quâelle a affaire Ă la relation de la vĂ©ritĂ© comme cause »22. En dâautres termes, chez Lacan, le signifiĂ© passe sous la barre du signifiant nous nâavons quâun rapport Ă ce dernier et non plus au premier. Câest pourtant de ce rapport au signifiant singulier que lâefficacitĂ© symbolique se soutient. 32Ainsi si on a rappelĂ© que LĂ©viâStrauss compare non sans raison le chaman et le psychanalyste, Lacan dans un texte moins connu des anthropologues Lacan, 1966c, compare cette foisâci, le discours de la science tel que celui auquel prĂ©tend LĂ©viâStrauss Ă un discours religieux, et analyse lâinterprĂ©tation faite par LĂ©viâStrauss du chaman et de la magie en montrant quâelle Ă©vacue le sujet. On remarquera dâailleurs quâil ne parle pas du rapport du signifiant au signifiĂ© Ă propos de lâefficacitĂ© symbolique comme LĂ©viâStrauss en parlait en 1949, mais du rapport du signifiant au signifiant, glissement qui nâest Ă©videmment pas sans implications. Une fois encore, il dĂ©forme » la perspective de LĂ©viâStrauss sur la question du symbolique Sur la magie je pars de cette vue, qui ne laisse pas de flou sur mon obĂ©dience scientifique, mais qui se contente dâune dĂ©finition structuraliste. Elle suppose le signifiant rĂ©pondant comme tel au signifiant câest nous qui soulignons. Le signifiant dans la nature est appelĂ© par le signifiant dans lâincantation. Il est mobilisĂ© mĂ©taphoriquement. La Chose en tant quâelle parle rĂ©pond Ă nos objurgations. Câest pourquoi cet ordre de classifications naturelles que jâai invoquĂ© de LĂ©viâStrauss, laisse dans sa dĂ©finition structurale entrevoir le pont de correspondances par lequel lâopĂ©ration efficace est concevable, sous le mĂȘme mode oĂč elle a Ă©tĂ© conçue ». 33Si, Lacan, malgrĂ© cette lĂ©gĂšre distorsion », reconnaĂźt lâapproche structurale de LĂ©viâStrauss au sens dâune obĂ©dience scientifique », câest surtout pour porter sa critique plus loin. Ce nâest pas seulement faire valoir lâabsence du signifiĂ© dans le paradigme symbolique dont il est question pour lui. Ce quâil pointe de maniĂšre critique câest surtout lâĂ©vacuation du sujet singulier dans lâapproche structurale, ou autrement dit la nĂ©cessitĂ© pour la science dâexclure le signifiant singulier, champ par excellence de lâinvestigation de la psychanalyse Câest pourtant lĂ une rĂ©duction qui y nĂ©glige le sujet. Chacun sait que la mise en Ă©tat du sujet, du sujet chamanique y est essentielle. Observons que le chaman, disons en chair et en os, fait partie de la nature et que le sujet corrĂ©latif de lâopĂ©ration a Ă se recouper dans ce support corporel. Câest ce mode recoupement qui est exclu du sujet de la science. Seuls ses corrĂ©latifs structuraux dans lâopĂ©ration lui sont repĂ©rables ⊠» Lacan, 1966c 351. 34En dâautres termes, le savant anthropologue ne peut accĂ©der Ă lâessence du chamanisme puisquâil ne sâintĂ©resse quâĂ sa dimension structurale. Câest donc, en quelque sorte, un cadeau empoisonnĂ©e » que Lacan fait Ă LĂ©viâStrauss si le structuralisme est bien du cĂŽtĂ© de la science, ce dernier ne peut quâĂ©chouer Ă rendre compte du sujet chaman. Lâanthropologue ne peut quâentrevoir le pont de correspondances », mais non rendre compte de la vĂ©ritĂ© de cette relation. On voit donc comment Lacan ne ramĂšne pas la question de lâefficacitĂ© symbolique Ă celle de la science sinon Ă sa critique, sans pour autant Ă©chouer dans le relativisme ou dans le rejet de la science. Nous sommes alors en 1966 et Lacan peut dĂšs lors affirmer quâil n yâa pas de science de lâhomme parce que lâhomme de la science nâexiste pas, seulement son sujet » ibid. 339. 23 Pour rendre compte de ce dĂ©ni Lacan va analyser lâacte fondateur de Descartes du cogito, en tant ... 24 Ni la psychanalyse ni la science ne relĂšvent du progrĂšs, car contrairement Ă ce quâon sâimagine ... 35Nâestâce pas lĂ une mise au point sans appel de lâentreprise de scientificitĂ© qui pourrait ĂȘtre visĂ© par les sciences humaines ? Il ne sâagit pourtant pas pour Lacan de tomber dans le subjectivisme, mais sinon dâanalyser le rapport de la consistance de la vĂ©ritĂ© pour un sujet Ă la connaissance de la science. Le sujet de la science et le sujet de la psychanalyse se retrouvent dans un rapport inĂ©dit, rapport de mutuelle exclusion pourrait-on dire celui du langage et de la parole. Câest ainsi que Lacan, soutiendra que la dĂ©marche structurale tout comme la science » en gĂ©nĂ©ral, impliquent un dĂ©ni du sujet, opĂ©ration par laquelle elles se constituent comme telles. Le dĂ©sir de savoir du savant est tel quâil constitue la science en tant quâelle lâĂ©vacue lui-mĂȘme. Câest un paradoxe, mais lâhomme de science se trouve exclu par dĂ©finition de son savoir et de sa science, puisquâil ne saurait sây inscrire il est donc le sujet qui est en exclusion interne Ă son objet » ibid. 341. Câest la raison pour laquelle la science, si on la regarde de prĂšs, nâa pas de mĂ©moire. Elle oublie les pĂ©ripĂ©ties dont elle est nĂ©e, quand elle est constituĂ©e, autrement dit une dimension de la vĂ©ritĂ© que la psychanalyse met lĂ hautement en exercice » ibid. 350. Câest que la vĂ©ritĂ© comme cause » telle que lâexplore et lâinvestit la psychanalyse, la science nâen veut rien savoir on parle alors de mĂ©canisme de dĂ©nĂ©gation » ou de forclusion » en clinique psychanalytique. En dâautres termes, le savoir de la science dĂ©pend de la nĂ©gation du sujet il vise sa clĂŽture23. Alors que par exemple, la logique moderne participe de cette tentative de clĂŽturer le sujet de la science, le dernier thĂ©orĂšme de Gödel montre quâelle y Ă©choue ce qui veut dire que le sujet en question reste le corrĂ©lat de la science, mais un corrĂ©lat antinomique puisque la science sâavĂšre dĂ©finie par la non-issue de lâeffort pour le suturer ». On voit donc que pour Lacan la science en mĂȘme temps quâelle sâĂ©tend, que son langage se prĂ©cise, Ă©choue cependant Ă rĂ©duire un reste » ce reste est prĂ©cisĂ©ment le sujet de la psychanalyse et la parole. Câest ainsi quâil scelle la science et la psychanalyse tout en sâĂ©loignant de la conception de la science comme scientisme24. Psychanalyse de lâanthropologie clinique de la fonction symbolique chez LĂ©viâStrauss 36En exposant les conceptions lacaniennes et lĂ©viâstraussiennes de maniĂšre symĂ©trique, on constate que les diffĂ©rences sâaccentuent, se creusent et en mĂȘme temps se prĂ©cisent. Il sâagit dâaller plus loin et de reprendre les fils de cette discussion afin de dĂ©placer Ă notre tour le problĂšme en tirant les consĂ©quences de toutes ces assertions. La linguistique dont sâinspire LĂ©viâStrauss vise les rĂ©gularitĂ©s, or ce nâest pas la visĂ©e de Lacan, comme on lâa vu. Quâestâce que cela implique que de sâintĂ©resser aux irrĂ©gularitĂ©s, que ce soit au niveau anthropologique ou au niveau de la nature du paradigme symbolique ? 37Cela signifie quâon ne peut rĂ©duire un sujet Ă la structure de sa langue ou du langage. Car si les cĂ©lĂšbres formules consacrĂ©es de Lacan, dâune part lâinconscient est structurĂ© comme un langage », et dâautre part lâinconscient existe, se motive de la structure, soit du langage », nous indiquent en derniĂšre instance que la structure, câest le langage, qui est en mĂȘme temps condition de lâinconscient, ou encore, ce qui revient un peu au mĂȘme, quâil nây a dâinconscient que chez lâĂȘtre parlant ⊠», ces thĂšses nâont cependant pas une simple portĂ©e de clĂŽture ou de coupure » mais surtout une valeur heuristique et engagent une recherche » Guyomard, 2004. En dâautres termes, si la possibilitĂ© de la parole du sujet est directement liĂ©e Ă sa langue et au langage, elle ne saurait ĂȘtre arraisonnĂ©e ni par lâun ni par lâautre. La notion de fonction symbolique telle que LĂ©viâStrauss lâĂ©labore est ainsi mise Ă mal, et le structuralisme de Lacan est bien diffĂ©rent de celui de LĂ©viâStrauss. Il nâen partage pas lâidĂ©al de science. 25 Plus tard câest la dimension du rĂ©el qui prendra le pas sur les deux autres. 38Ă partir de ces aspects, on commence Ă saisir lâĂ©ventuelle contribution de la psychanalyse pour Ă©clairer, cette foisâci, certains ressorts inconscients de la science » anthropologique. La dimension symbolique telle que la manipule le psychanalyste est fort diffĂ©rente de celle envisagĂ©e par LĂ©viâStrauss, ne seraitâce que parce que dĂšs 1949 Lacan la couple Ă la dimension imaginaire25. ConsidĂ©rant la vĂ©ritĂ© de la parole en tant que cause du sujet, Lacan ouvre un espace Ă la singularitĂ© du sujet quâil prend bien soin dâarticuler Ă lâuniversel du langage de la science. Ce nâest Ă©videmment pas le cas de LĂ©viâStrauss qui tend plutĂŽt Ă effacer le sujet et sa singularitĂ© au nom de la science. Si câest cet anthropologue qui est reconnu comme le pĂšre de la notion fondamentale en anthropologie de fonction symbolique », il peut ĂȘtre intĂ©ressant de soulever certains aspects relativement mĂ©connus de sa conception et qui posent problĂšme relativement aux enjeux prĂ©sentĂ©s ici. 39En effet, tout se passe comme si la fonction symbolique de LĂ©vi-Strauss Ă©tait une façon dâĂ©viter lâinconscient psychanalytique et le remaniement de la question du symbolique par rapport au sujet quâeffectue Lacan. On peut se reporter Ă son entretien avec Bellour 1979 B â Je voulais revenir et insister, en les formulant de façon plus globale, sur les questions qui prĂ©cĂ©daient, en particulier celle sur la psychanalyse Ă laquelle vous me semblez nâavoir quâĂ moitiĂ© rĂ©pondu. Ceci, dans la mesure oĂč les clivages que vous pratiquez se trouvent Ă©luder spĂ©cifiquement la dimension fondamentale de lâinconscient comme production du dĂ©sir. L-S â Mais est-ce la dimension fondamentale de lâinconscient ? Je nâen suis nullement convaincu ». 40Si LĂ©viâStrauss a bien repĂ©rĂ© une dimension mythopoĂŻĂ©tique dans laquelle se dĂ©ploie lâexercice de la cure psychanalytique, il nâest pas certain que lâon puisse cependant rapporter celleâci Ă la fonction symbolique telle quâil lâentend. En effet, LĂ©viâStrauss dĂ©nie la singularitĂ© du sujet. Dans les textes que nous avons Ă©voquĂ©s LĂ©viâStrauss nous dit que la fonction symbolique renvoie Ă un ensemble de structures intemporelles que lâon appellerait inconscient », et dĂšs lors, nous verrions sâĂ©vanouir la derniĂšre diffĂ©rence entre la thĂ©orie du chamanisme et celle de la psychanalyse. Lâinconscient cesse dâĂȘtre lâineffable refuge des particularitĂ©s individuelles, le dĂ©positaire dâune histoire unique, qui fait de chacun de nous un ĂȘtre irremplaçable. Il se rĂ©duit Ă un terme par lequel nous dĂ©signons une fonction la fonction symbolique [âŠ] qui chez tous les hommes sâexerce selon les mĂȘmes lois ; qui se ramĂšne en fait Ă lâensemble de ses lois » 1949 a 232 41Puis, un peu plus loin, LĂ©viâStrauss avance que lâinconscient est toujours vide ; ou plus exactement, il est toujours aussi Ă©tranger aux images que lâestomac aux aliments qui le traversent ». Il est en fait lâorgane dâune fonction, la fonction symbolique ». Du coup, il se borne Ă imposer des lois structurales qui Ă©puisent sa rĂ©alitĂ© » ibid. 233. On le voit, lâassimilation est totale et radicale, et lâinconscient vidĂ© de toute pulsion, de toute dimension singuliĂšre, de tout dĂ©sir. Il est Ă©quivalent Ă la fonction symbolique » qui est une sorte de mĂ©canique opĂ©ratoire de lâintellect. 42Face Ă une telle conception, on ne peut que se remĂ©morer la boutade de Barthes âIl faut quâune porte soit ouverte ou fermĂ©e est un proverbe structuraliste » Barthes, 1995a 337. Nây a tâil pas en effet une rage structuraliste » rage qui a peutâĂȘtre pris des gants, mais une rage polie est toujours une rage », se demandait alors Barthes non sans une dĂ©licieuse malice ? Car dans lâauguste mouvement par oĂč LĂ©viâStrauss affirme lâhypothĂšse symbolique, il ne rĂ©siste pas, on le voit, Ă la tentation dâarraisonner lâinconscient de la psychanalyse Ă sa fonction symbolique ». 43Mais ce nâest pas tout, et câest le deuxiĂšme aspect de notre hypothĂšse. Que LĂ©viâStrauss fasse du modĂšle structural un modĂšle explicatif tout-puissant et universel est une chose qui en soi est assez problĂ©matique ; cette critique a dĂ©jĂ Ă©tĂ© Ă©laborĂ©e en grande partie et Ă juste titre, notamment par les anthropologues postmodernes. Mais soulignons que la maniĂšre dont il le fait dans ces textes mĂ©rite une attention particuliĂšre car et câest lĂ une des modalitĂ©s de son discours gĂ©nĂ©ralement peu mise en valeur car il hypothĂšque la psychanalyse au nom dâun progrĂšs irrĂ©sistible de la science biochimique et physiologique 26 On peut remarquer au passage que le geste de LĂ©viâStrauss est dâautant plus retord » quâil sâap ... Lâanalogie entre les deux mĂ©thodes chamanique et psychanalytique serait plus complĂšte si la description en termes psychologiques des psychoses et des nĂ©vroses disparaĂźt un jour devant une conception physiologique, ou mĂȘme biochimique [âŠ] Cette Ă©ventualitĂ© pourrait ĂȘtre plus proche quâil ne semble, puisque les recherches suĂ©doises rĂ©centes ont mis en Ă©vidence des diffĂ©rences chimiques, portant sur leur richesses en polynuclĂ©otides, entre les individus normaux et celles de lâaliĂ©nĂ© » ibid. 23126. 44Ces quelques remarques qui vantent les mĂ©rites dâune approche biologique de lâĂȘtre humain se retrouvent plus tard dans dâautres Ă©crits. Dans Le totĂ©misme aujourdâhui, LĂ©viâStrauss Ă©crit En vĂ©ritĂ© les pulsions et les Ă©motions nâexpliquent rien ; elles rĂ©sultent toujours soit de la puissance du corps, soit de lâimpuissance de lâesprit. ConsĂ©quences dans les deux cas, elles ne sont jamais des causes. Cellesâci ne peuvent ĂȘtre cherchĂ©es que dans lâorganisme, comme seule la biologie sait le faire, ou dans lâintellect, ce qui est lâunique voie offerte Ă la psychologie comme Ă lâethnologie » 1962 103. 45On voit bien que la fonction symbolique » sâassimile Ă un intellect renvoyĂ© au fonctionnement du cerveau, tel quâil est envisagĂ© par la biologie. Un des commentateurs de LĂ©viâStrauss nous dit dâailleurs Il semble bien que LĂ©viâStrauss pour sa part est convaincu de la complĂ©mentaritĂ© entre le structuralisme et la neurobiologie âŠ. Les propriĂ©tĂ©s logiques que le structuralisme met en Ă©vidence pourraient se rapporter en derniĂšre instance Ă lâorganisation cĂ©rĂ©brale » Rechtman, 1996 64-65. 46On voit donc que LĂ©viâStrauss rejette lâinconscient freudien pulsionnel et singulier pour asseoir le symbolisme structuraliste sur une prĂ©tendue correspondance avec le modĂšle de la science biologique. Il renaturalise » donc la dimension symbolique au nom dâun idĂ©al de la science on pourrait dire quâil existerait pour lui, en quelque sorte, lâidĂ©e dâun signifiĂ© naturel ». LĂ©viâStrauss Ă©radique la logique du signifiant singulier, arraisonne le sujet, Ă©crase sa parole, le rĂ©duisant Ă une pure fonction au nom de la science⊠En derniĂšre instance il nâhĂ©site pas Ă ramener le paradigme symbolique Ă un biologisme sous le thĂšme de la mĂ©taphore poĂ©tique ». Et, câest peutâĂȘtre ici que le dĂ©saccord avec Lacan est le plus saillant. 47En effet, pour ce qui est du dĂ©bat qui nous intĂ©resse, nous retrouvons une rĂ©ponse trĂšs tranchĂ©e Ă lâhypothĂšse de LĂ©viâStrauss formulĂ©e en 1949, Ă savoir celle de lâisomorphisme » mĂ©taphorique estâce un hasard si, 28 ans plus tard, Lacan reprend en effet la question de la nature de la poĂ©sie pour dĂ©crire lâactivitĂ© psychanalytique ? Mais il le fera Ă lâopposĂ© de ce quâaura fait LĂ©viâStrauss. Lacan, plutĂŽt que dâassimiler la psychanalyse Ă une science nâhĂ©sitera pas Ă dire, non sans provocation malicieuse, quâelle serait une escroquerie » elle serait, dâune certaine façon, du chiquĂ©, je veux dire du semblant. [âŠ] Il est parvenu Ă vos oreilles que jâai parlĂ© de la psychanalyse comme pouvant ĂȘtre une escroquerie » Lacan, 1977a. 48Cependant, sâil sâagit dâune escroquerie », encore fautâil sâentendre sur les termes. Il les prĂ©cisera en effet la psychanalyse est peut-ĂȘtre une escroquerie, mais ce nâest pas nâimporte laquelle â câest une escroquerie qui tombe juste par rapport Ă ce quâest le signifiant, soit quelque chose de bien spĂ©cial, qui a des effets de sens. [âŠ] Ă cet Ă©gard, la psychanalyse nâest pas plus une escroquerie que la poĂ©sie elleâmĂȘme » Lacan 1977b. 49Lacan jusquâĂ la fin de sa vie nâaura pas cĂ©dĂ© ni Ă la tentation du scientisme, ni non plus Ă celle de condamner de la science. Conclusion et aujourdâhui ? 27 Câest notamment non un anthropologue mais un psychanalyste qui a menĂ© cette critique particuliĂšre ... 28 Câest le cas notamment de Sulloway qui soutient que Freud Ă©tait en rĂ©alitĂ© un biologiste de lâe ... 29 Pour la petite histoire, Sulloway est chercheur au MIT. Or, ce [âŠ] dĂ©partement allait devenir c ... 30 Citons un commentateur de ces mouvements, pour se remettre dans lâambiance » de lâĂ©poque de la ... 50Câest donc un curieux paradoxe, peu soulignĂ© il est vrai dans lâhistoire de lâanthropologie culturelle oĂč LĂ©viâStrauss occupe une place de premier plan, que cette Ćuvre soit aussi celle par oĂč se rĂ©introduit le naturalisme contemporain27. Ce nâest pas un hasard si lâon retrouve les mĂȘmes rĂ©fĂ©rences Ă lâĆuvre de Freud que faisait LĂ©viâStrauss dans les annĂ©es 50, chez des anthropologues contemporains qui tentent de biologiser la psychanalyse28. De mĂȘme que LĂ©viâStrauss cite les rares passages oĂč Freud mise sur les progrĂšs de la biologie contre la psychanalyse pour justifier lâhypothĂšse dâune biologisation » de la fonction symbolique, certains auteurs soutiennent que Freud Ă©tait un biologiste de lâesprit qui avait cachĂ© son inspiration biologisante en dâautres termes, les concepts fondamentaux de la psychanalyse se trouveraient dans les neurosciences29. Câest lĂ un habile moyen dâignorer lâĆuvre de Freud, mais aussi surtout celle de Lacan. Ce discours se prĂ©sente sous le masque dâune fringante modernisation scientifique », alors quâil est Ă©videmment en son fond une rĂ©gression, un retour en arriĂšre, une dĂ©nĂ©gation de la singularitĂ© et du dĂ©sir du sujet. Cette prolifĂ©ration dâun savoir de nature scientiste nâest pas sans rappeler lâinconscient cĂ©rĂ©bral » du XIXe siĂšcle et sa prolifĂ©ration Gauchet, 1992. Or si plus personne ne se souvient aujourdâhui de la morphoâpsychologie, du constitutionalisme, ou de lâanthropomĂ©trie de Galton30 mis Ă part quelques rares historiens des sciences, la dĂ©suĂ©tude et lâoubli qui frappent aujourdâhui ces conceptions surannĂ©es constituent assurĂ©ment le pendant du triomphe des sciences humaines contemporaines et du paradigme symbolique. Mais pour combien de temps encore ? Car force est de constater que la psychologie et lâanthropologie cognitives contemporaines sont un avatar de cette conception ancienne. Si une bataille fut autrefois gagnĂ©e, il semblerait que la guerre a dĂ©sormais repris⊠Tout en se distinguant des neurosciences et de la biologie, les courants cognitivistes trouvent en ces derniĂšres la rĂ©fĂ©rence obligĂ©e Ă leur exigence matĂ©rialiste, comme LĂ©viâStrauss. Et il sâagit bien lĂ toujours du mĂȘme motif celui dâun certain idĂ©al de science que lâon cherche Ă appliquer Ă lâhomme, quitte Ă le faire taire, Ă empĂȘcher sa parole. 51En tout Ă©tat de cause, rouvrir le dossier relativement oubliĂ© des rapports de lâanthropologie et de la psychanalyse et des enjeux de leurs paradigmes respectifs doit inviter Ă poursuivre la discussion aujourdâhui. La psychanalyse interrogea radicalement le projet de toute science de lâhomme et mĂȘme de toute science, pour le remettre en cause et renouveler la vieille question celle posĂ©e Ă lâĂ©poque oĂč les sciences humaines furent fondĂ©es de savoir si la psychanalyse et lâanthropologie sont hors ou dans la science ? 31 En effet, le linguiste luiâmĂȘme nâest-il pas linguiste que dans la mesure exacte oĂč il est lui- ... 32 On pourrait rapprocher ces travaux de Lacan de ceux de Foucault ou de Derrida, qui furent produit ... 33 Nous pensons ici aux rĂ©cents travaux dâEric Chauvier. On peut se reporter Ă sa thĂšse oĂč lâauteur ... 34 On ne peut Ă©viter aussi dâĂ©voquer ici la contribution de la philosophie contemporaine comme celle ... 52La clinique, en tant que son objet est la singularitĂ© de la parole dâun sujet, interroge de maniĂšre exemplaire la question de lâobjet de la science en gĂ©nĂ©ral, et donc de tout idĂ©al de science dans les sciences de lâhomme. Toute prĂ©tention scientifique en tant quâelle vise le gĂ©nĂ©ral et Ă©radique les irrĂ©gularitĂ©s du sujet, ne peut-elle pas faire lâobjet dâune problĂ©matisation psychanalytique, surtout si elle prĂ©tend faire une science de lâhomme »31 ? La psychanalyse, par son attention aux mots singuliers, ne pouvait peutâĂȘtre que dĂ©construire lâaspect fantasmatique du projet consistant Ă Ă©laborer une science » de lâhomme32. Cependant il se pourrait que ce soit aujourdâhui les recherches en anthropologie contemporaine33 qui se soit engagĂ©e plus avant dans lâinvestigation du paradigme symbolique quant Ă ses consĂ©quences thĂ©oriques et pratiques34. Et, mĂȘme si Lacan ne fut pas dupe de la science lĂ oĂč LĂ©viâStrauss le fut, son Ćuvre nâa pas, bien entendu, Ă ĂȘtre exemptĂ©e dâun travail critique. Il semble que la situation psychanalytique nâa guĂšre Ă©tĂ© inquiĂ©tĂ©e jusquâalors par la critique postmoderne des effets de langage, qui a pour intĂ©rĂȘt de montrer les illusions prĂ©sentes dans les concepts fondateurs des disciplines. Estâce pour avoir poussĂ© assez loin sa pratique du langage et sa thĂ©orisation critique que, jusquâĂ aujourdâhui, elle a rĂ©ussi Ă sâen prĂ©server ? Rien nâest moins sĂ»r, mais câest certainement de bon augure pour la psychanalyse ; comme le disait Tosquelles 1991 » ce qui caractĂ©rise la psychanalyse câest quâil faut lâinventer ». 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Sur la question de cette notion fondatrice en sciences humaines et ses origines on peut notamment se rapporter Ă lâarticle de KremerâMarietti 2007 qui lâinscrit dans lâhĂ©gĂ©lianisme et dont on peut retenir le commentaire suivant Symboliser est lâacte essentiellement fondateur dans le sens oĂč fonder, câest ici poser Ă la fois la condition de possibilitĂ© et lâaccomplissement de la convention humaine, du pacte incontournable. Si la psychanalyse met au jour la topique symbolique, lâethnologie la confirme et les sciences humaines lâimpliquent ». 2 DâaprĂšs ces doctrines, le trouble psychique Ă©tait dĂ» Ă processus neuroâdĂ©gĂ©nĂ©ratif. 3 Il faut rappeler que Durkheim, fondateur de la sociologie, tout comme Ribot, fondateur de la psychologie en France, Ă©taient tous deux philosophes de formation. Seul Mauss, fondateur de lâethnologie et neveu de Durkheim ne lâĂ©tait pas. 4 La citation complĂšte mĂ©rite lâattention pour donner un aperçu de son propos Il nây a pas dâautres causes que des causes naturelles. Il nây a pas dâexceptions aux lois de la physique. Dans le social, on est confrontĂ© au mĂȘme matĂ©riel » citĂ© par Dosse, 1995 247. 5 Sur ces questions on se reportera Ă lâexcellente critique de Bernard Juillerat 2001 9-38 concernant cette approche naturaliste en gĂ©nĂ©ral. Elle constitue notre rĂ©fĂ©rence en la matiĂšre. 6 Câest notamment le cas du trĂšs mĂ©diatisĂ© Livre noir de la psychanalyse oĂč les auteurs, aprĂšs avoir critiquĂ© la psychanalyse, font en fin dâouvrage lâapologie des thĂ©rapies neuroâcomportementales Meyer, 2005. 7 Comment ne pas voir que les rĂ©cents dĂ©bats autour de lâefficacitĂ© thĂ©rapeutique de la psychanalyse en France autour de lâamendement Accoyer sâinscrivent aussi dans ce mĂȘme phĂ©nomĂšne Ă©valuatif inspirĂ© des approches cognitives anglo-saxonnes ? 8 Câest le cas dâune lecture qui semble devenir frĂ©quente et qui, mĂȘme si elle est incontestablement fĂ©conde philosophiquement, peut laisser de cĂŽtĂ© certaines questions spĂ©cifiques aux Ćuvres Maniglier, 2006. 9 En effet, les rapports de Lacan Ă LĂ©viâStrauss ont dĂ©jĂ Ă©tĂ© remarquablement explorĂ©s mais de maniĂšre diffĂ©rente. Lacan serait dâabord tributaire de Durkheim, puis son retour Ă Freud se ferait par LĂ©viâStrauss Ă qui il devrait lâessentiel de ses concepts Zafiropoulos, 2001, 2003. Dans une lecture complĂ©mentaire Ă cette derniĂšre, nous insisterons quant Ă nous sur leurs diffĂ©rences et sur la fĂ©conditĂ© de la lecture lacanienne de LĂ©viâStrauss. 10 On ne prĂ©sentera pas ici lâensemble des recherches dâanthropologie psychanalytique qui furent menĂ©es depuis plus dâun siĂšcle de recherche de lâanthropologie amĂ©ricaine avec Margaret Mead et les culturals studies du dĂ©but du siĂšcle, jusquâaux dĂ©veloppements de Roheim, de DĂ©vereux ou de Bastide en France jusquâĂ la fin des annĂ©es 1970. On peut notamment se reporter sur ces questions Ă la prĂ©face de François Gantheret 1993 Ă Totem et Tabou qui dĂ©gage ces aspects. 11 Depuis Lâoedipe africain dâOrtigues 1966 la psychanalyse inspirĂ©e de Lacan nâa pas exprimĂ© grand-chose sur lâanthropologie semble tâil. De plus, si dans la premiĂšre Ă©dition de ce livre, rĂ©fĂ©rence est faite aux concepts lacaniens, il nâen sera plus de mĂȘme dans la 3e Ă©dition 1984. Au fond, Ortigues nâĂ©taitâil pas avant tout philosophe ? On peut se reporter au numĂ©ro consacrĂ© par LâHomme qui lui rend hommage â lâĂ©tendue de son Ćuvre dĂ©borde largement le champ de la psychanalyse on regardera notamment lâarticle de Vincent Descombes, 2005 â ainsi quâĂ lâentretien de Simone Gerber et Alex Raffy dans la revue Le coq HĂ©ron qui fait notamment Ă©tat de la clinique africaine dans les annĂ©es cinquante 2004. Cependant, une autre tentative sâĂ©labore et sâaffirme comme incontournable aujourdâhui. Cette autre anthropologie psychanalytique vise Ă intĂ©grer les avancĂ©es des recherches psychanalytiques, notamment cliniques, et les avancĂ©es des recherches en sciences sociales Assoun & Zafiropoulos, 2001, 2004, 2007. Notre travail est proche de cette perspective. 12 On pense ici notamment Ă lâouvrage de FavretâSaada qui fit date, Les mots, la mort, les sorts la sorcellerie dans le bocage 1977. 13 Mieux encore, comme on le sait, elleâmĂȘme en dĂ©pend la production des faits de laboratoire sâinscrit elle aussi dans la culture et la science est imbibĂ©e de valeurs Latour & Wooglar, 1988. 14 Comme nous le verrons Lacan dĂ©veloppe un certain rapport de la psychanalyse Ă la science. Il ne sâagit certainement pas de tomber dans la caricature antiâscientifique, mais de distinguer la science de la psychanalyse, tout en essayant dâĂ©lucider leurs liens. 15 Cette affirmation mĂ©riterait bien entendu de plus longs dĂ©veloppements, que nous nâavons pas les moyens dâexposer ici. 16 CâestâĂ âdire au sens oĂč lâon parle dâune science physique. 17 AuâdelĂ de leurs diffĂ©rences, ces deux auteurs plutĂŽt tenus Ă lâĂ©cart du dĂ©bat aujourdâhui postulent davantage quâil existe une diffĂ©rence de nature ontologique entre la pensĂ©e magique et la pensĂ©e rationnelle. 18 Le concept dâabrĂ©action se trouve essentiellement valorisĂ© dans les premiĂšres Ă©laborations thĂ©oriques freudiennes conçues sur le modĂšle de la catharsis. LâabrĂ©action en psychanalyse consiste en une dĂ©charge Ă©motionnelle par laquelle un sujet se libĂšre de lâaffect attachĂ© Ă un Ă©vĂ©nement traumatique ou souvenir dâun Ă©vĂ©nement traumatique, lui permettant ainsi de ne pas devenir ou rester pathogĂšne Laplanche & Pontalis, op. cit.. 19 » Pour les imagos, en effet, dont câest notre privilĂšge que de voir se profiler, dans notre expĂ©rience quotidienne et la pĂ©nombre de lâefficacitĂ© symbolique, les visages voilĂ©s, â lâimage spĂ©culaire semble ĂȘtre le seuil du monde visible ⊠» Lacan, 1966d 95. 20 MalgrĂ© sa tentative et son rapprochement avec Einstein, il nâĂ©chappa au feu de la critique de Popper qui paraĂźt deux ans plus tard 1988. 21 Nous reprenons ici les analyses classiques de Milner 2000. 22 Des distinctions sont lĂ encore Ă faire entre le chaman et le psychanalyste. Pour lâun, il sâagit de la vĂ©ritĂ© comme cause efficiente son domaine sont les signifiants naturels ; la magie quâil dĂ©clenche provient du fait quâil manipule de signifiants naturels tonnerre, pluie, mĂ©tĂ©ores et miracles, pour le psychanalyste, Lacan parle de la vĂ©ritĂ© comme cause matĂ©rielle puisquâil sâagit de la matĂ©rialitĂ© » de la parole qui est sans rapport avec la nature Lacan 1966c. 23 Pour rendre compte de ce dĂ©ni Lacan va analyser lâacte fondateur de Descartes du cogito, en tant que sujet de la science. La possibilitĂ© du cogito et de la fondation de la science moderne par Descartes ne reposait-elle pas en effet sur lâidĂ©e dâune mathesis universalis, câestâĂ âdire dâun langage qui, prenant la mathĂ©matique comme modĂšle, pourrait rendre compte de tous les phĂ©nomĂšnes ? Lacan dans Les problĂšmes cruciaux pour la psychanalyse leçon du 9 juin 1965 indique bien que le cogito cartĂ©sien dĂ©finit les rapports du sujet au savoir comme Ă©tant le sujet de la connaissance. En dâautres termes, si le cogito fonde le sujet de la science et son langage, câest aussi en excluant le sujet il y a un je pense qui est savoir sans le savoir » ibid.. Le je pense » nâa plus de rapport avec le suis » câest au contraire dans les ratages, lapsus, symptĂŽmes que je » trouve son statut de sujet. La condition de sujet parlant sera toujours dâĂȘtre divisĂ©e on ne se rĂ©vĂšle jamais autrement Ă soi-mĂȘme que dans un miâdire de sa parole, car la vĂ©ritĂ©, contrairement Ă la certitude de la science, nâest pas toute ». Le langage de la science est en quelque sorte lâenvers de la parole du sujet. 24 Ni la psychanalyse ni la science ne relĂšvent du progrĂšs, car contrairement Ă ce quâon sâimagine, la science tourne en rond, et nous nâavons pas de raison de penser que les gens du silex taillĂ© avaient moins de science que nous. La psychanalyse, notamment, nâest pas un progrĂšs... câest un biais pratique pour mieux se sentir » Lacan, 1977. 25 Plus tard câest la dimension du rĂ©el qui prendra le pas sur les deux autres. 26 On peut remarquer au passage que le geste de LĂ©viâStrauss est dâautant plus retord » quâil sâappuie sur deux suggestions isolĂ©es de Freud, oĂč le pĂšre de la psychanalyse Ă©voque la possibilitĂ© dâun anĂ©antissement de la psychanalyse par le progrĂšs de la science objectiveces remarques se trouvent dans Au delĂ du principe de plaisir Freud, 1968 78,et dans les nouvelles confĂ©rences Freud, 1984 [1933] 198. 27 Câest notamment non un anthropologue mais un psychanalyste qui a menĂ© cette critique particuliĂšre de LĂ©viâStrauss, notamment dans un livre qui sâintitule La causalitĂ© psychique Green,1995. 28 Câest le cas notamment de Sulloway qui soutient que Freud Ă©tait en rĂ©alitĂ© un biologiste de lâesprit » 1992. Il nâen demeure pas moins que Freud a malgrĂ© tout posĂ© lâautonomie du psychisme et mis en garde la psychanalyse face Ă la tentation dâune main mise par la mĂ©decine psychiatrique. Freud, mĂ©decin de formation, sâĂ©tait Ă©cartĂ© peu Ă peu de lâapproche biologisante et mĂ©dicale de la psychiatrie. 29 Pour la petite histoire, Sulloway est chercheur au MIT. Or, ce [âŠ] dĂ©partement allait devenir celui des sciences cognitives, ardent dĂ©fenseur des thĂšses de lâĂ©volutionnisme social et historien des sciences spĂ©cialiste du darwinisme⊠» selon Michel Plon, qui le prĂ©sente en introduction. 30 Citons un commentateur de ces mouvements, pour se remettre dans lâambiance » de lâĂ©poque de la thĂšse lacanienne Physiologues et mĂ©decins, surtout observateurs du corps, ont dĂ©crit des morphoâtypes et des biotypes constitutions, plutĂŽt anatomiques ; tempĂ©raments, plutĂŽt physiologiques, auxquels ils ont rattachĂ© des traits de caractĂšre de nature psychologique, tandis que psychologues et moralistes ont plus particuliĂšrement nommĂ© caractĂšres depuis ThĂ©ophraste les structures psychologiques fondamentales sousâjacentes Ă la personnalitĂ© et susceptibles de regroupement ; des morphopsychologues ont tentĂ© de trouver des corrĂ©lations entre caractĂšres et morphotypes » Torris, 1972. 31 En effet, le linguiste luiâmĂȘme nâest-il pas linguiste que dans la mesure exacte oĂč il est lui-mĂȘme un sujet parlant ? » se demande Milner Ă juste titre Dans certains cas â notamment, quand il Ă©tudie sa propre langue â, le retour sur soi lui est ainsi constamment imposĂ© ; mais de toute maniĂšre, Ă supposer mĂȘme quâil Ă©tudie une langue qui ne soit pas la sienne, il ne peut lâĂ©tudier sans la faire sienne, si peu que ce soit. Il sâĂ©tablit donc toujours une coĂŻncidence entre lâobservateur et lâobservĂ© ; cela ne manque pas de crĂ©er une structure paradoxale » Milner, 2004. 32 On pourrait rapprocher ces travaux de Lacan de ceux de Foucault ou de Derrida, qui furent produits dans des pĂ©riodes proches⊠sauf que ces philosophies vont jusquâĂ dĂ©faire le sujet lui-mĂȘme. De plus, cette idĂ©e que la science ne sâassimile pas Ă la vĂ©ritĂ© se trouve chez Lacan bien avant les annĂ©es cinquante en 1936 notamment dans un article intitulĂ© Au delĂ du principe de rĂ©alitĂ© » quâil consacre Ă la psychanalyse et Ă Freud [âŠ] la science peut sâhonorer de ses alliances Ă la vĂ©ritĂ© ; elle peut se proposer comme son phĂ©nomĂšne et sa valeur ; elle ne peut dâaucune façon lâidentifier pour sa fin propre » Lacan, 1966b 78. Et câest ainsi quâil sâexprimait encore dans son sĂ©minaire du 15 novembre 1977 Lacan, 1977d » Ce que jâai Ă vous dire, je vais vous le dire, câest que la psychanalyse est Ă prendre au sĂ©rieux, bien que ce nâest pas une science. Ce nâest mĂȘme pas une science du tout. Parce que comme lâa montrĂ© surabondamment un nommĂ© Karl Popper, câest que ce nâest pas une science parce que câest irrĂ©futable. Câest une pratique qui durera ce quâelle durera, câest une pratique de bavardage. Et aucun bavardage nâest sans risque ». 33 Nous pensons ici aux rĂ©cents travaux dâEric Chauvier. On peut se reporter Ă sa thĂšse oĂč lâauteur sâappuie sur la micro observation et sur une pragmatique du langage pour dĂ©crire sa propre famille 2003. Comme le faisait remarquer un Ă©minent anthropologue, cette anthropologie consiste dans le recueil de nos BOV, câest-Ă -dire dans lâĂ©coute de la bande originale de nos vies. On peut aussi se reporter notamment Ă son dernier ouvrage 2008 oĂč lâauteur investit une institution qui sâoccupe du placement familial. 34 On ne peut Ă©viter aussi dâĂ©voquer ici la contribution de la philosophie contemporaine comme celle de Judith Buttler qui montre les effets normatifs de toute thĂ©orie Butler, 2002, et dont une partie du travail consiste dans une critique et une reprise des donnĂ©es de la psychanalyse. Le nĂ©ophyte se reportera utilement Ă son recueil dâentretiens Butler, 2005.Top of page References Bibliographical reference Florent Gabarron-Garcia, De lâanthropologie de la psychanalyse Ă la psychanalyse de lâanthropologie », Journal des anthropologues, 116-117 2009, 69-104. Electronic reference Florent Gabarron-Garcia, De lâanthropologie de la psychanalyse Ă la psychanalyse de lâanthropologie », Journal des anthropologues [Online], 116-117 2009, Online since 01 June 2010, connection on 24 August 2022. 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